Skip to main content
Imprimer

CA Paris, Pôle 5 – Ch. 2, 28 janvier 2022, n° 20/09968

Par un arrêt en date du 28 janvier 2022, la Cour d’appel de Paris a jugé que devait être déclarée irrecevable faute de mise en cause de l’ensemble des co-auteurs d’une comédie musicale, l’action de l’un des compositeurs sur le fondement d’une atteinte portée à son droit moral d’auteur.

En l’espèce, le requérant se présentait comme le compositeur de l’intégralité des chansons d’une comédie musicale.

Une société de production française avait produit en 2017 des représentations basées sur ce même spectacle, comprenant notamment une mise en scène, des costumes et des personnages très différents de ceux du spectacle initial.

Dans les faits, il s’est avéré que le requérant n’était pas l’unique auteur de la comédie musicale car il avait écrit la composition sur la base d’un livret antérieur. De plus, deux autres intervenants avaient également collaboré en faible partie à l’œuvre musicale du requérant.

À la suite des représentations de la nouvelle comédie musicale, le requérant, a fait assigner la société en contrefaçon de droits d’auteur, soutenant que cette production portait atteinte à son droit moral, sans mettre en cause le reste des co-auteurs.

Précisément, le compositeur a fait valoir que la mise en scène du nouveau spectacle était, à bien des égards, différente de la version originale, en ce qu’elle ajoutait des lumières, et se différenciait de la version d’origine par une entrée et une sortie d’artistes qui n’étaient pas conformes à la première création. De plus, le nouveau spectacle ajoutait un personnage secondaire ainsi que des costumes différents des costumes originels. 

Les demandes formées par ce compositeur sur le fondement de son droit moral ont été jugées irrecevables en première instance.

La Cour d’appel de Paris devait décider si le compositeur d’une œuvre de collaboration pouvait agir seul pour la défense de son droit moral sans mettre en cause les co-auteurs.

Selon l’article L.113-3 du Code de la propriété intellectuelle, l’œuvre de collaboration est la propriété commune des co-auteurs qui doivent exercer leur droit d’un commun accord.

Par cet arrêt, la Cour rappelle tout d’abord que si le co-auteur d’une œuvre de collaboration peut normalement agir seul pour la défense de son droit moral, c’est à la condition que sa contribution puisse être individualisée.

Dans le cas contraire, il doit, à peine d’irrecevabilité, mettre en cause les autres auteurs de l’œuvre ou de la partie de l’œuvre à laquelle il a contribué.

Le compositeur soutenait qu’il était recevable en sa demande sans mettre en cause les co-auteurs, soutenant qu’il était l’unique compositeur de la comédie musicale, les collaborations des deux autres intervenants, étant selon lui trop faibles pour altérer sa qualité d’auteur principal de la composition. De plus, selon le compositeur, sa contribution à la composition était individualisable par rapport à celle de l’auteur du livret antérieur.

La cour d’appel n’a pas suivi pas le raisonnement du requérant, et a retenu que l’atteinte au droit moral alléguée par le compositeur ne portait pas sur la musique de la comédie musicale sur laquelle il revendiquait certes une contribution individualisable, mais sur la comédie musicale dans son ensemble et en particulier sur sa mise en scène.

Ainsi, cette demande nécessitait de mettre en cause l’ensemble des co-auteurs de l’œuvre de collaboration, faute de pouvoir individualiser la contribution du compositeur sur l’ensemble de la comédie musicale.

En conséquence, le jugement de première instance a été confirmé, et le compositeur déclaré irrecevable à agir en atteinte à son droit moral.

Emilie CUER

Imprimer