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Un contrat de franchise doublé d’un contrat de location-gérance de fonds de commerce ont été signés pour l’exploitation d’un supermarché à enseigne « Spar ». Moins de deux années après le début de son exploitation commerciale, le franchisé s’est trouvé en difficulté financière et a sollicité du franchiseur la résolution des deux contrats, en soutenant un défaut de conseil et d’information à son encontre. Face au refus du franchiseur et après l’ouverture d’une liquidation judiciaire du franchisé, le liquidateur a engagé une action en nullité du contrat de franchise contre le franchiseur.

Le liquidateur invoquait le dol comme vice du consentement au soutien de la nullité du contrat de franchise. Il prétendait que le franchisé avait été trompé volontairement par le franchiseur au motif que son chiffre d’affaires réel avait été 40% inférieur à celui figurant dans le prévisionnel que le franchiseur lui avait remis. Était également invoquée à la charge du franchiseur, pour caractériser le dol, une absence de transmission des résultats de l’exploitation du fonds de commerce par le précédent franchisé.

Par un arrêt rendu le 2 mai 2024, la Cour d’appel de Lyon a clairement distingué, d’une part, l’obligation d’information générale pesant sur le franchiseur et, d’autre part, l’obligation pesant sur le franchisé de s’informer, impliquant des démarches et actes positifs de sa part pour recueillir les informations pertinentes dont il estimait avoir besoin pour évaluer la rentabilité de l’activité projetée.

S’agissant de l’obligation d’information du franchiseur, la Cour d’appel a relevé clairement que cette obligation n’incluait pas la transmission par le franchiseur d’un prévisionnel d’exploitation ou d’une étude de marché mais que les informations transmises par le franchiseur au franchisé devaient obligatoirement être sérieuses et sincères. Toujours selon la Cour, le franchiseur étant tenu à ce titre d’une obligation de moyens, puisque le succès d’une franchise dépend également dans une large mesure des qualités personnelles du franchisé, le franchiseur n’engageait pas sa responsabilité contractuelle si les informations qu’il avait communiquées s’avéraient ne pas correspondre à la réalité tout en étant sérieuses et sincères.

Si le franchisé contestait la qualité des informations du franchiseur il lui appartenait de rapporter la preuve du manque de sérieux et de réalisme de celles-ci.

Ainsi, le simple constat d’un différentiel, même important, entre un prévisionnel transmis par le franchiseur et les résultats réels ne suffisait pas à démontrer la volonté du franchiseur de tromper le franchisé et donc l’existence d’un dol imputable au franchiseur constitutif d’un vice du consentement.

L’obligation d’information du franchiseur se doublait d’une obligation de s’informer à la charge du franchisé. À ce titre, la Cour d’appel de Lyon a retenu, en l’espèce, qu’il appartenait au franchisé de solliciter du franchiseur des informations sur les résultats et les éventuelles difficultés financières du précédent exploitant.

En effet, si le franchisé estimait ces informations utiles, il devait les réclamer au franchiseur avant de signer le contrat. Il s’agit là d’une obligation habituelle pesant sur le franchisé applicable même si aucune clause du contrat ne la prévoyait.

Cette obligation de s’informer pesant sur le franchisé était ici d’autant plus justifiée que le franchisé disposait « d’une expérience non négligeable dans le secteur de la gestion des magasins de la grande distribution en raison de ses emplois précédents et qu’il était ainsi apte à apprécier le caractère réaliste des documents prévisionnels fournis par le franchiseur et à rechercher par lui-même des informations supplémentaires ou tout au moins les réclamer ». La Cour a également relevé que, du fait de sa qualité le franchisé « pouvait solliciter l’intervention d’un tiers conseil pour obtenir plus d’informations » et enfin qu’il a « disposé du laps de temps nécessaire pour y procéder ».

Toute volonté de tromper de la part du franchiseur a ainsi été écartée, entraînant le rejet de la demande de nullité pour dol.

A également été évoqué dans le cadre de cette affaire le reproche d’un soutien abusif apporté par le franchiseur à son franchisé, au motif que des aides auraient été accordées par le premier au second : délais de paiement, plan d’étalement, suppression de la redevance sur les murs au titre du contrat de location-gérance, diminution du dépôt de garantie mensuel, mise en œuvre de tarifs préférentiels et d’une ristourne de fidélité.

Ces mesures d’aide ont été écartées par la Cour qui les a considérées comme non constitutives d’un soutien abusif du franchisé : en effet, aucune fraude dans la mise en œuvre de ces aides n’était caractérisée, ni d’immixtion dans la gestion du débiteur, ni de disproportion entre ces mesures de soutien et les garanties prises par le franchiseur.

Le franchiseur a ainsi été mis hors de cause également sur ce fondement.

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