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Directeur de l’INPI, 29 avril 2024 – NL 23-0159

Il n’est pas toujours d’usage de procéder à des dépôts en tant que marque des noms de personnage de fiction, d’autant que la protection par le droit des marques a déjà été refusée au motif que le signe, lorsqu’apposé sur des produits dérivés, ne sera pas perçu par les consommateurs comme une indication de l’origine des produits mais uniquement comme une indication purement descriptive, une référence à l’œuvre cinématographique et au personnage du film.

En l’espèce, le producteur de la série audiovisuelle « Emilie in Paris » a introduit une action en nullité contre la marque française « Cadault Cosmetics » reprenant le nom patronymique du personnage du grand couturier Pierre Cadault de la série. Cette marque a été déposée par un tiers, en classe 03 pour les produits cosmétiques, le 14 décembre 2020 soit deux mois après la première diffusion de la série.

Le producteur soutenait que le dépôt avait été effectué de mauvaise foi, en fraude de ses droits, le titulaire de la marque s’étant volontairement placé dans le sillage de la série mondialement connue afin de bénéficier de sa notoriété.

L’INPI fait application des critères retenus par la Cour de cassation qui impliquent qu’il soit établi au préalable que le déposant de la marque connaissait l’existence du signe en cause et savait qu’un tiers avait besoin d’en disposer pour ses activités actuelles ou pour un projet en cours de développement.

Pour démontrer la connaissance du signe par le tiers et donc l’intention frauduleuse, le producteur faisait valoir d’une part, la reprise d’un patronyme inventé à l’orthographe peu commune en raison de la succession des consonnes « LT » et d’autre part, le succès immédiat de la série audiovisuelle « Emily in Paris » dès son lancement, le 2 octobre 2020. Enfin, le caractère emblématique du personnage de la série, égérie de la haute couture française était également mis en avant. Le producteur produisait à l’appui de son argumentation des articles de presse et extraits de la série, antérieurs au lancement de la série jusqu’à la date du dépôt, concernant tant la série que le personnage portant le nom patronymique éponyme à la marque contestée.

L’INPI a procédé à un examen des pièces produites mais a rejeté l’action en nullité aux motifs que les éléments et arguments fournis par le producteur ne suffisaient pas à eux-seuls à démontrer que le titulaire de la marque contestée avait connaissance, au jour de son dépôt, 14 décembre 2020, de l’usage antérieur du signe.

Selon l’INPI, l’examen des pièces n’établissait ni la renommée du personnage dès les premiers mois suivant la diffusion de la série en France, ni que le public associait immédiatement l’élément verbal « Cadault », employé seul, au personnage de la série ou que l’usage du seul l’élément verbal « Cadault », sans reprise du prénom Pierre était associé par le public au nom du personnage de la série.

L’INPI retient également que les produits cosmétiques visés au dépôt de la marque ne relèvent pas du même domaine que la haute couture dans lequel évolue le personnage, même s’ils peuvent être associés indirectement.

L’INPI a retenu qu’il n’était pas établi que le titulaire de la marque a agi dans l’intention de priver illégitimement le producteur d’un signe nécessaire à son activité ou d’obtenir un droit exclusif à des fins autres que celles relevant des fonctions d’une marque.

Cette décision met en évidence la difficulté de démonstration de la connaissance de l’existence du signe et d’intérêts sciemment méconnus au moment du dépôt lorsque ce dernier suit de peu la diffusion de l’œuvre audiovisuelle ou du film. Lors d’une production, même si les contrats de merchandising ne sont pas finalisés, le dépôt d’une marque peut donc s’avérer utile.

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