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Nous revenons sur le décret du 5 juillet 2024 (D. 2024-692, 5 juill. 2024, JO, 6 juill.), publié au journal officiel le 6 juillet 2024, qui fixe les modalités pratiques de mise en œuvre de la contre-visite médicale prévue à l’article L1226-1 du code du travail.
 
1. Encadrement juridique de la contre-visite médicale : 14 ans d’attente
L’article L1226-1 du code du travail confère à l’employeur la faculté de diligenter une contre-visite médicale lorsque le salarié, en arrêt de travail, perçoit des indemnités complémentaires visant à maintenir tout ou partie de sa rémunération. Cette contre-visite médicale poursuit deux objectifs principaux (art. L1226-1 c. trav.) :

  • vérifier la présence du salarié à son domicile pendant les heures d’interdiction de sortie ;
  • vérifier si l’état de santé du salarié justifie l’arrêt de travail prescrit.

L’article L1226-1 du code du travail renvoie à un décret le soin de déterminer les formes et conditions de la contre-visite médicale. Ce décret n’est paru que le 6 juillet 2024, soit 14 ans après la promulgation de la loi 2008-596 du 25 juin 2008 qui a introduit l’article L1226-1 au sein du code du travail.
 
Jusques à la parution du décret du 5 juillet 2024, la jurisprudence définissait les conditions de mise en œuvre de la contre-visite médicale. Les règles dégagées par la jurisprudence sont pour la plupart reprises par le décret du 5 juillet 2024 et ces décisions permettent d’éclairer les dispositions issues de ce décret.
 
Trois nouveaux articles encadrant les modalités de mise en œuvre de la contre-visite médicale sont intégrés par le décret du 5 juillet 2024 au sein du code du travail (art. R1226-10 à R1226-12 c. trav.).

2. Objectif de la contre-visite médicale
L’objectif de la contre-visite médicale est de permettre à un médecin, mandaté par l’employeur, de se prononcer sur le caractère justifié de l’arrêt de travail, ainsi que sur sa durée (art. R1226-11 c. trav.).

3. Obligations d’information incombant au salarié
Afin que le médecin mandaté puisse procéder à cette contre-visite, une obligation d’information pèse sur le salarié relative à son lieu de convalescence. Le salarié doit communiquer à l’employeur, dès le début de l’arrêt de travail ainsi qu’en cas de changement, son lieu de repos s’il est différent de son domicile (art. R1226-10 c. trav.).
 
Également, lorsque l’arrêt de travail du salarié porte la mention « sortie libre », le salarié doit communiquer à l’employeur les horaires auxquels la contre-visite peut s’effectuer (art. R1226-10 c. trav.).
 
A notre sens, l’employeur peut donc désormais, lorsqu’il reçoit un arrêt de travail d’un salarié, légitimement lui rappeler les dispositions susmentionnées et l’interroger sur son lieu de repos et, lorsqu’il est en sortie libre, sur les horaires possibles de contre-visite.

4. Modalités de réalisation de la contre-visite médical
Le décret du 5 juillet 2024 offre une certaine flexibilité quant au lieu et aux horaires de la contre-visite médicale. La contre-visite médicale s’effectue à tout moment de l’arrêt de travail et, au choix du médecin (art. R1226-11 c. trav.) :

  1. soit au domicile du salarié ou au lieu qu’il lui a communiqué, sans qu’aucun délai de prévenance ne soit exigé, en dehors des heures de sortie autorisées ou aux heures communiquées par le salarié en cas de « sortie libre » ;
  2. soit au cabinet du médecin, sur convocation de celui-ci par tout moyen conférant date certaine à la convocation. En cas d’impossibilité de se déplacer, notamment en raison de son état de santé, le salarié en informe le médecin en précisant les raisons.

5. Conséquences de la contre-visite médicale
5.1 Information de l’employeur et du salarié
A l’issue de la contre-visite médicale, le médecin informe l’employeur (art. R1226-12 c. trav.) :

  1. soit du caractère justifié ou injustifié de l’arrêt de travail ;
  2. soit de l’impossibilité de procéder au contrôle pour un motif imputable au salarié, tenant notamment à son refus de se présenter à la convocation ou à son absence lors de la visite à domicile.

L’employeur transmet sans délai cette information au salarié.

5.2 Le cas échéant, suspension des indemnités complémentaires
En cas d’arrêt injustifié ou d’impossibilité de procéder au contrôle, l’employeur est alors en droit de suspendre le versement des indemnités complémentaires (art. L1226-1 c. trav.). Pour mémoire, l’éventuel caractère injustifié de l’arrêt de travail ou l’absence du salarié sur son lieu de repos à un horaire où il eût dû y être, ne peut en revanche en aucun cas justifier une sanction disciplinaire.

*

Le décret du 5 juillet 2024 fixe ainsi les conditions précises de la contre-visite médicale, jusques ici encadrées principalement par la jurisprudence. ll introduit un équilibre entre les droits de l’employeur, soucieux de lutter contre les éventuels abus en matière d’arrêt de travail, et les obligations du salarié, tout en préservant la possibilité d’un contrôle médical impartial.

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