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CA Colmar, 1ère Ch. Civ., section A, 18 janvier 2011, M. Hubert Wolf c/autres parties.
Nullité de la clause d’exclusion en cas d’atteinte au droit de vote de l’associé.

Selon une décision rendue par la cour d’appel de Colmar le 18 janvier 2011, une clause qui stipule que l’exclusion d’un associé serait prononcée à « l’unanimité des associés non concernés » méconnaît un droit fondamental de l’associé, à savoir le droit de vote. La clause d’exclusion étant nulle, la délibération ayant abouti à l’exclusion de l’associé et les délibérations prises en exécution de la mesure d’exclusion sont nulles.

En principe, tout associé a le droit de rester dans la société et ne peut en être exclu ni être contraint de céder ses parts ou actions contre son gré. Toutefois, le législateur admet des dérogations à ce principe dans certaines formes de sociétés, notamment dans la société par actions simplifiée dans laquelle il est possible de prévoir dans les statuts des causes d’exclusion d’un associé (article L227-16 du Code de commerce), ou dans la société d’exercice libéral (Loi du 31 décembre 1990) ou bien dans la société à capital variable (Article L231-6 du Code de commerce).

En dehors de ces hypothèses légales, la jurisprudence a également admis ce type de clauses (Cass. com. 8 mars 2005). Cependant, la licéité de ces clauses est subordonnée à certaines conditions, comme le réaffirme cet arrêt. En effet, pour être valable, la clause d’exclusion doit :
– Prévoir les motifs d’exclusion : la clause doit avoir un objet précis.
– Prévoir l’organe compétent pour décider de l’exclusion.
– Respecter les droits de la défense.
– Si c’est l’assemblée générale qui a compétence pour décider de l’exclusion, l’associé concerné doit pouvoir voter sur son exclusion.
– Prévoir une indemnisation.

L’affirmation jurisprudentielle selon laquelle l’associé concerné par l’exclusion doit pouvoir voter a suscité divers litiges, comme en témoigne l’arrêt étudié. La solution rendue par la cour d’appel le 18 janvier 2011 confirme une décision rendue par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 23 octobre 2007. Cette dernière décision a en effet affirmé que l’associé doit pouvoir voter sur son exclusion même s’il est majoritaire. Sachant que la loi et la jurisprudence ne prévoient pas de majorité spécifique pour le vote de l’exclusion d’un associé, cette décision est prise à la majorité des associés, et l’associé majoritaire pourra donc faire échec à son exclusion tandis que le minoritaire ne sera pas maitre de cette exclusion. Afin d’éviter l’hypothèse dans laquelle un majoritaire voterait sur sa propre exclusion (hypothèse de l’arrêt rendu le 23 octobre 2007) rendant ainsi son exclusion impossible, il convient de veiller à ne pas conférer dans les statuts le pouvoir d’exclure un associé à l’assemblée générale mais à un autre organe social tel que Conseil d’administration (CA Rouen 8 février 1974), Conseil de surveillance, comité de gestion, comité exécutif ou tout autre organe ad hoc dans une SAS. De cette façon, la décision d’exclusion pourra valablement être prise par les seuls représentants des autres actionnaires.

Ces décisions mettent une nouvelle fois en avant le caractère essentiel du droit de vote de l’associé, caractère essentiel affirmé depuis des décennies par la jurisprudence notamment lorsqu’il s’agit pour un associé de voter sur sa propre exclusion.

Matthieu Bringer

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