La Cour de justice de l’Union européenne (« CJUE ») a rendu le 13 octobre 2011 un arrêt attendu, suite au renvoi préjudiciel opéré par la Cour d’appel de Paris en octobre 2009, dans une affaire opposant la société Pierre Fabre Dermo-Cosmétique au Conseil de la concurrence.
Pour mémoire, la question préjudicielle posée par la Cour d’appel consistait à demander si une interdiction générale et absolue faite aux distributeurs agréés, dans un réseau de distribution sélective, de revendre les produits sur Internet, constituait une restriction de concurrence caractérisée ne pouvant faire l’objet d’une exemption par catégorie, mais susceptible de faire l’objet d’une exemption individuelle.
La CJUE rappelle dans un premier temps que ce type de restrictions constitue une restriction par objet, sauf à être objectivement justifiée.
Elle relève qu’il appartient donc pas à la Cour d’appel de Paris d’apprécier si l’interdiction de revente sur Internet prévue dans les accords Pierre Fabre Dermo-Cosmétique poursuivent de manière proportionnée des objectifs légitimes et si, notamment compte tenu des propriétés des produits, cette clause pourrait être justifiée. A titre d’indice, elle rappelle toutefois avoir jugé, au regard du principe de liberté de circulation, que la vente de médicaments non soumis à prescription médicale et de lentilles de contact ne nécessitaient pas un conseil personnalisé au client. Elle précise en outre que la préservation de l’image de prestige ne constitue pas un objectif légitime justifiant une restriction de concurrence.
La CJUE considère ainsi que, si elle n’est pas objectivement justifiée, une telle interdiction absolue de revendre sur Internet ne peut pas bénéficier du règlement d’exemption par catégorie. En effet, une telle restriction a au moins pour objet de restreindre les ventes passives aux utilisateurs finals localisés en dehors de la zone de chalandise physique du revendeur concerné.
La CJUE rappelle toutefois que la restriction consistant à prohiber de facto toute revente sur Internet dans un réseau sélectif, peut faire l’objet d’une exemption individuelle au titre de l’article 101 paragraphe 3 du Traité. Cependant, considérant qu’elle ne dispose pas des éléments suffisants pour apprécier en l’espèce si les conditions de cet article sont satisfaites, elle laisse à la Cour d’appel de Paris le soin d’effectuer cette analyse.
La Cour d’appel devra donc dire si les conditions d’une exemption individuelle sont réunies dans cette affaire étant d’ores et déjà précisé qu’il est extrêmement difficile de renverser la présomption d’effet anticoncurrentiel.