La Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA), a été instaurée par la loi du 17 juillet 1978 portant sur l’amélioration des relations entre l’administration et le public, qui a notamment consacré le droit d’accès du public aux documents administratifs. Elle a notamment pour mission de rendre des avis, consécutifs à la saisine des personnes auxquelles est opposé un refus de communication d’un document administratif et qui veulent pouvoir éventuellement exercer un recours contentieux.
Le 8 janvier 2015, la Commission a rendu un avis intéressant sur le droit d’accès au code source d’un logiciel. En l’espèce, une personne avait sollicité le directeur général des finances publiques aux fins de se voir communiquer le code source du logiciel simulant le calcul de l’impôt sur les revenus des personnes physiques, et ce dans le but de le réutiliser pour ses travaux de recherches universitaires. Devant le refus de l’administration, il saisit alors la CADA de cette demande.
La Commission débute son raisonnement en définissant la notion de code source, qui est selon elle un ensemble de fichiers informatiques qui contient les instructions devant être exécutées par un micro-processeur. Cette définition peut étonner, car ordinairement le code source désigne les instructions en elles-mêmes, exprimées sous forme textuelle, et non les fichiers informatiques qui en sont le support numérique. En tous cas, la CADA considère que l’ensemble de fichiers informatiques composant le code source est un document administratif au sens de l’article 1er de la loi du 17 juillet 1978, qui en donne effectivement une définition large car ne s’attachant, notamment, ni à la forme ni au support.
La qualification de document administratif emporte alors application de la loi de 1978 et en premier lieu consécration du droit d’accès au code source par toute personne qui en formule la demande, sous réserve des dispositions de l’article 6 de cette loi. La communication ne devra pas, en particulier, porter atteinte à la recherche des infractions fiscales, ce que la CADA rappelle dans son avis. En second lieu, le code source pourra être réutilisé, à des fins autres que celle de la mission de service public de l’administration fiscale sous réserve toutefois que des tiers à l’administration ne détiennent de droits de propriété intellectuelle sur ce code.
Le directeur général de l’administration des finances publiques avait refusé la communication du code source au prétexte qu’il se composait de trop nombreux fichiers qui, pour être exploitables, devraient faire l’objet d’un trop lourd traitement. La Commission réfute cette argumentation. En effet, si la loi de 1978 n’impose pas à l’administration, préalablement à la communication du document, de mettre en œuvre d’autres traitements que les traitements automatisés d’usage courant, elle ne fait pas pour autant, des difficultés matérielles et techniques découlant de la forme du document, un motif de refus à sa communication. C’est donc au demandeur de mettre en œuvre les traitements adéquats, s’il veut pouvoir ensuite réutiliser convenablement le code source.
Cet avis de la CADA est remarquable par son objet, cependant la solution générale qui y est exprimée paraît oublier certaines difficultés. Tout d’abord, la CADA ne mentionne que la réserve tenant à l’existence de droits de propriété intellectuelle de tiers. Mais même en l’absence de droits de tiers, l’administration dispose de droits de propriété intellectuelle sur les logiciels créés par ses fonctionnaires et agents. Il semble donc que la réutilisation du code source – en dehors des cas d’exception aux droits d’auteur – ne pourra se faire sans la conclusion préalable d’une licence entre l’administration et le demandeur, ce qui est prévu aux articles 15 et suivants de la loi de 1978.
D’autre part, il faudra concilier le droit de réutilisation du code source des logiciels de l’administration avec le décret du 2 octobre 1996, modifié par un décret du 26 septembre 2005. Ces dispositions règlementaires prévoient que certains des fonctionnaires ou agents de l’Etat et de ses établissements publics, ayant directement participé à la création d’un logiciel, bénéficient d’une prime d’intéressement aux produits tirés de cette création. En l’absence de valorisation du logiciel, le décret dispose que les fonctionnaires et agents publics peuvent en disposer librement, sous réserve de conclure une convention en ce sens avec la personne publique concernée.
Enfin, et surtout, cet avis n’a pas valeur obligatoire. Le directeur de l’administration des finances publiques pourra décider de le suivre ou non. S’il ne le suivait pas, le demandeur pourrait alors saisir les juridictions administratives.
Sylvain NAILLAT
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