Dans un arrêt du 18 mars 2015, la Cour de cassation pose pour principe que, à défaut d’accord collectif prévoyant une indemnisation, l’absence de prise des jours de repos au titre de la réduction du temps de travail n’ouvre droit à une indemnité que si cette situation est imputable à l’employeur.
I. Absence de disposition légale ou réglementaire venant préciser le sort des jours de RTT acquis mais non-pris
Quid des JRTT non-pris soit avant la fin de la période de référence, soit dans l’hypothèse d’une rupture du contrat de travail ? Telle est la question qui, jusqu’à présent, n’était pas régie par des dispositions légales ou règlementaires spécifiques.
Seule la question du bénéfice et du paiement des JRTT acquis pendant un préavis dispensé avait pour l’heure été tranchée par la jurisprudence. En effet, à ce sujet, il est constant que « l’employeur ne peut priver le salarié du bénéfice des jours de RTT auxquels celui-ci aurait pu prétendre s’il avait travaillé durant le préavis » (Cass. Soc. 17 avril 2013, 11-29.010 ; Cass. Soc. 8 avril 2009, 07-44.068).
Mais qu’en est-il lorsque l’accord portant réduction et aménagement du temps de travail ne prévoit aucune modalité particulière de prise de JRTT ? Tel est l’apport de l’arrêt du 18 mars dernier.
II. Nouvelle construction jurisprudentielle : l’indemnisation des jours de RTT non pris n’est pas systématique
À l’occasion d’une affaire tranchée le 18 mars 2015, la Cour de cassation prend pour la première fois position sur la question, en plaçant l’accord collectif au cœur du débat.
L’affaire concerne un salarié licencié pour motif personnel le 12 décembre 2008, avec dispense d’exécution du préavis. À l’occasion de la contestation de la cause réelle et sérieuse de son licenciement, il réclamait le paiement de 13 jours de RTT non pris.
Pour sa défense, l’employeur faisait valoir que l’accord de réduction du temps de travail en vigueur au sein de la Société et antérieur à la loi du 20 août 2008, ne prévoyait pas le paiement des jours de RTT non pris.
La cour d’appel de Paris a toutefois accueilli l’ensemble des demandes du salarié en estimant que « tout salarié a droit à une indemnité compensatrice correspondant aux jours non pris ».
S’agissant des jours de RTT, pour lesquels il n’existe aucune disposition législative ou réglementaire comparable, la Cour de cassation a préféré adopter une position plus nuancée, qui l’a conduite ici à annuler la condamnation prononcée en appel.
L’arrêt du 18 mars 2015 pose le principe suivant :
« A défaut d’un accord collectif prévoyant une indemnisation, l’absence de prise des jours de repos au titre de la réduction du temps de travail n’ouvre droit à une indemnité que si cette situation est imputable à l’employeur ».
Reprochant aux juges d’appel de ne pas avoir vérifié « que tel était le cas », la Haute juridiction a annulé la condamnation au paiement des 13 jours de RTT, tout en renvoyant les parties devant la cour d’appel, qui devra cette fois se prononcer sur l’imputabilité de l’absence de prise des jours de RTT, à défaut de précision dans l’accord collectif.
Concrètement,
Si l’accord ne se prononce pas sur le sort des jours de RTT acquis en cas de rupture du contrat, dans ce cas, le salarié ne pourra en revendiquer le paiement que si l’absence de prise des jours de RTT est « imputable à l’employeur ».
En clair, si le salarié était parfaitement informé du nombre de jours acquis et que l’organisation du travail lui permettait de les poser en cours d’année ou durant la période de préavis, les jours non pris seront définitivement perdus et non indemnisés.
S’il est démontré, en revanche, que l’employeur n’a pas mis le salarié en mesure de prendre l’ensemble de ses repos, une indemnité pourra être accordée par le juge. Dans le cas d’une dispense de préavis décidée par l’employeur, on peut supposer que le défaut de prise des jours de RTT lui sera a priori imputé. Il semble donc plus prudent de les indemniser.
En conclusion, le salarié doit percevoir une indemnité compensatrice si l’accord d’aménagement et de réduction du temps de travail l’a prévu.
Dans le cas contraire, les jours de RTT non pris dans le délai sont perdus, à moins d’établir que l’employeur n’a pas mis le salarié en mesure de les poser.
Bettina SCHMIDT
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