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Conseil d’Etat, 9 mars 2016, 378129

Salarié protégé en absence prolongée ou répétée : le Conseil d’Etat s’aligne sur la jurisprudence de la Cour de Cassation en matière de salarié non protégé et statue que l’employeur n’est plus tenu de procéder à une recherche de reclassement préalable au licenciement.

Maladie, absence prolongée ou répétée, inaptitude, salarié protégé ou non : autant de situations dont les diverses combinaisons conduisent à des procédures simples ou plus complexes, particulièrement s’agissant de la recherche de reclassement.

En quelques mois à peine, la Loi et la Jurisprudence ont profondément bouleversé les principes posés en matière de reclassement. Au sein des juridictions, après la Cour de Cassation, le Conseil d’Etat vient de poser une nouvelle pierre à cet édifice en pleine mutation.

Retour sur le statu Quo ante :

Aux termes d’une longue évolution, la jurisprudence a construit un statut protecteur bien établi, imposant à l’employeur de rechercher un reclassement avant de prononcer aussi bien le licenciement d’un salarié devenu inapte (partiellement ou totalement) que le licenciement d’un salarié pour motif économique.

Dans les deux types de situation, la jurisprudence a construit un corpus de règles assez étendu afin de bien cadrer les obligations de l’employeur en la matière.

Ainsi, s’agissant de l’inaptitude, la Cour a fait peser sur l’employeur une obligation de moyens très renforcée en faisant notamment peser sur celui-ci la charge de la preuve établissant la réalité des recherches, leur sérieux, leur conformité aux prescriptions du Médecin du Travail et ce quel que soit le degré d’inaptitude fût-elle totale et à tous postes – n’en déplaise à l’absurdité d’une telle contrainte dans ce dernier cas de figure.

De la même manière, en matière de licenciement pour motif économique, les tribunaux ont démontré au fil des années une volonté d’imposer que la recherche soit opérée de façon effective et efficace.

Ce bel ordre établi vient de connaître une série d’infléchissements notables.

En matière de licenciement économique, la recherche de reclassement du salarié à l’étranger n’est plus une obligation pour l’employeur à moins que le salarié n’en fasse expressément la demande (nouvel article L 1233-4-1 du Code du travail modifié par la loi Macron du 6 août 2015).

En matière d’inaptitude, la loi REBSAMEN du 17 août 2015 a prévu l’exemption de toute recherche de reclassement lorsque le Médecin du Travail mentionne que le maintien dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à la santé du salarié (nouvel article L 1226-12 al 2).

A noter que cette exemption n’a été prévue par le législateur que dans les cas d’inaptitude d’origine professionnelle, instaurant – par choix ou par oubli, l’avenir le dira – une discrimination quelque peu curieuse.

Enfin dans son arrêt du 9 mars dernier, le Conseil d’Etat est venu tout simplement exclure la nécessité d’une recherche de reclassement préalablement au licenciement d’un salarié en arrêt maladie prolongé ou répété et ce en totale contradiction avec les règles établies jusque-là. En particulier, la fiche 9 de la Circulaire DGT du 30 juillet 2012 prévoyant expressément l’obligation d’une telle recherche de reclassement se trouve de facto contredite par la position de la Haute Cour Administrative.

Moralité pour le salarié protégé : mieux vaut être déclaré inapte que malade longtemps pour espérer le bénéfice d’une recherche de reclassement… A condition que l’inaptitude n’ait pas une origine professionnelle et que le Médecin n’estime pas le maintien dans l’entreprise préjudiciable !

Pour conclure, l’infléchissement des obligations de l’employeur en matière de reclassement se confirme mais en même temps les multiples variables à prendre en compte pour déterminer le champ juridique applicable devront conduire l’employeur à être particulièrement vigilant en la matière.

Virginie DELESTRE

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