Skip to main content
Imprimer
Loi n°2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine

Un nouvel article L.621-42 a récemment été introduit dans le code du patrimoine par la loi dite Création du 7 juillet 2016, afin de soumettre « l’utilisation à des fins commerciales de l’image des immeubles qui constituent les domaines nationaux (…) à l’autorisation préalable du gestionnaire de la partie concernée du domaine national ». L’article précise que cette autorisation pourra être assortie de conditions financières.

 

Pour rappel, par un arrêt du 16 décembre 2015, la cour d’appel administrative de Nantes avait confirmé la jurisprudence antérieure, et jugé que l’utilisation à des fins commerciales de l’image d’immeubles du domaine public, en l’espèce le château de Chambord, n’était pas soumise aux dispositions de l’article L.2125-1 du Code général de la propriété des personnes publiques, qui énonce que « toute occupation ou utilisation du domaine public d’une personne publique mentionnée à l’article L. 1 donne lieu au paiement d’une redevance ». En effet, la jurisprudence considère que cet article ne permet de soumettre à autorisation l’occupation ou l’utilisation du domaine public « que lorsqu’elle constitue un usage privatif de ce domaine public », et qu’en l’absence d’usage privatif, aucune redevance domaniale ne peut être réclamée sur le fondement de cet article, l’image d’un bien appartenant à une personne publique ne se confondant pas avec ce bien.

Mais contrairement à la jurisprudence antérieure, la cour d’appel administrative de Nantes avait également ajouté qu’une autorisation préalable, assortie ou non de conditions financières, devait être obtenue préalablement à toute utilisation à des fins commerciales de prises de vue d’un immeuble « appartenant au domaine public d’une personne publique ». La cour d’appel justifiait sa position en invoquant les « exigences constitutionnelles tenant à la protection du domaine public ».

Ainsi, l’utilisation à des fins commerciales de l’image d’immeubles de domaines nationaux est désormais soumise à autorisation de leurs gestionnaires sur le fondement de ce nouvel article L.621-42 du Code du patrimoine. Cette autorisation peut être soumise à des conditions financières (mais non obligatoirement des redevances). La liste des domaines nationaux sera déterminée par décret en Conseil d’Etat (article L.621-35 du Code du patrimoine). Cette liste comprendra certainement le domaine national de Chambord.

Reste désormais à savoir si les juridictions judiciaires étendront cette obligation d’autorisation préalable à l’ensemble des immeubles « appartenant au domaine public d’une personne publique », et non seulement aux seuls domaines apparaissant au sein de la liste déterminée par décret en Conseil d’Etat, en reprenant cette notion dégagée par la cour administrative de Nantes d’ « exigences constitutionnelles tenant à la protection du domaine public ».

Antoine JACQUEMART

Téléchargez cet article au format .pdf

Ayant eu connaissance d’une campagne publicitaire nationale visant à faire la promotion des chaussures de la marque KICKERS et reprenant, au sein de ses visuels, les termes « FOREVER YOUNG », il a assigné le distributeur des produits KICKERS en France.

 

Ses demandes ayant été rejetées par le tribunal de grande instance de Rennes, la société BRUNO SAINT HILAIRE, a formé appel de la décision et la Cour d’appel de Rennes, saisie du litige, permet ainsi d’enrichir la jurisprudence déjà fournie sur la protection des slogans publicitaires par le droit des marques.

 

La validité des dépôts de slogans à titre de marque a parfois été contestée, en raison de leur nature évocatrice. Malgré cela, les tribunaux sont souvent réticents à considérer qu’un slogan ne peut, per se, être déposé en tant que marque, l’article L711-1 du Code de la propriété intellectuelle listant parmi les signes pouvant être déposés en tant que marque les « dénominations sous toutes les formes » dont notamment les « assemblages de mots ».

 

Cependant, même déposé, il peut souvent s’avérer difficile pour les titulaires de ces marques d’obtenir une protection sur le fondement du droit des marques, comme l’illustre notamment cet arrêt.

 

En l’espèce, si la validité du dépôt en tant que marque du signe Image de la marquen’était pas contestée ici, le litige portait sur la réalité de l’usage.

 

L’article L714-5 du Code de la propriété intellectuelle énonce en effet qu’ « encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans juste motif, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans ».

 

La société BRUNO SAINT HILAIRE, à qui était opposée l’absence d’usage sérieux du signe Image de la marque, avait soutenu qu’elle utilisait sa marque, en produisant des « photographies de 4 personnes portants des vêtements et chaussures avec la mention Forever Y au-dessus de la marque Saint Hilaire », ou encore « la présentation d’un homme habillé sur un solex devant un panneau où figure les mêmes éléments et alors qu’il constitue un stand publicitaire (…) ». Elle reconnaissait néanmoins que ce signe était utilisé comme concept, ce qu’indiquait d’ailleurs son site : « Forever Y, c’est tout un état d’esprit… avoir confiance en soi, se sentir bien et libre, oser passer à l’acte… être Forever Y ».

 

La Cour d’appel de Rennes a estimé que le signe n’était dès lors pas utilisé dans une fonction d’identification de l’origine des produits, et a prononcé la déchéance de la marque à compter du 1er décembre 2013.

 

 

Si la contrefaçon n’était pour autant pas de facto écartée à ce stade, les actes argués de contrefaçon datant de septembre 2010, la contestation de l’usage effectif à titre de marque a s’est avérée efficace.

 

La Cour d’appel note que le signe FOREVER YOUNG avait été utilisé « dans le cadre des 40 ans de la marque KICKERS », « au sein d’une phrase écrite en langue anglaise, traduite ensuite en langue française », de manière descriptive « de la marque KICKERS éternellement jeune ». Elle estime, par conséquent et de manière plutôt cohérente avec la déchéance prononcée, que là aussi, ces mots étaient utilisés à titre d’expression courante et non à titre de marque. Aucun usage du signe à titre de marque n’ayant été réalisé antérieurement au 1er décembre 2013, la demande sur le fondement de la contrefaçon a par conséquent été rejetée.

 

Sur les demandes formées sur le fondement de la concurrence déloyale, la Cour confirme également le jugement, en estimant que la société BRUNO SAINT HILAIRE ne justifiait pas d’investissement ou de travail particulier pour développer le « concept » FOREVER YOUNG, dont la « valeur économique individualisée » n’était, selon la Cour, pas démontrée.

 

Antoine JACQUEMART

Imprimer