CJUE, 13 septembre 2018, C-26/17 P
La Cour de justice de l’Union européenne a confirmé le refus d’enregistrement d’une marque figurative constituée d’un motif composé de lignes ondulées entrecroisées, faute de caractère distinctif pour désigner les articles chaussants et certains produits des classes 10 et 18 visés au dépôt.
En l’espèce, le 27 juin 2012, la société Birkenstock avait déposé, en tant que marque figurative internationale désignant notamment l’Union européenne, la marque figurative suivante :
Cette marque avait été déposée pour certains produits des classes 10 (notamment les articles chaussants orthopédiques), 18 (notamment cuir et imitations de cuir), et 25 (notamment chaussures et semelles).
Le 21 novembre 2012, l’examinateur de l’EUIPO avait notifié au déposant un refus provisoire total ex officio de protection de la marque internationale dans l’Union, au motif que la marque serait dépourvue de tout caractère distinctif pour l’ensemble des produits concernés.
Le 15 mai 2014, la Chambre de recours de l’EUIPO avait confirmé cette décision de refus, en estimant également que le signe litigieux était dépourvu de caractère distinctif. La Chambre de recours avait justifié cette décision en expliquant que l’impression générale produite par le signe litigieux était selon elle banale, ce motif pouvant « se retrouver sur tous les produits en cause, pour lesquels il pouvait revêtir une fonction esthétique et/ou technique ». Selon la Chambre de recours, le public pertinent « percevrait, selon toute vraisemblance, ledit signe comme un simple motif de surface et non pas comme l’indication d’une origine commerciale particulière ».
Le Tribunal de l’Union européenne avait par la suite partiellement annulé la décision, jugeant que le refus n’était pas justifié « s’agissant des « membres, yeux et dents artificiels », matériels de suture ; matériel de suture à usage chirurgical » et « cuirs d’animaux, pelleteries » », mais en la confirmant pour les autres produits visés à l’enregistrement, dont les chaussures et semelles après avoir relevé que la Chambre de recours « avait appliqué à juste titre la jurisprudence relative aux signes se confondant avec l’apparence des produits ».
Par cet arrêt du 13 septembre 2018, la Cour de justice de l’Union européenne a confirmé en tous points la décision du Tribunal de l’Union européenne, validant ainsi le refus d’enregistrement de la marque figurative pour l’ensemble des produits visés à son dépôt, à l’exception des « « membres, yeux et dents artificiels », matériels de suture ; matériel de suture à usage chirurgical » et « cuirs d’animaux, pelleteries » ».
La Cour de justice a estimé que le Tribunal a rappelé à bon droit que « les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou celle de leur emballage, en l’absence de tout élément graphique ou textuel ». Par conséquent, en présence d’une marque se confondant avec l’apparence d’un produit, seule la marque qui diverge « de manière significative » de la norme ou des habitudes du secteur « est susceptible de remplir sa fonction essentielle d’indication d’origine ».
En l’espèce, la Cour retient que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en estimant possible l’utilisation du signe en tant que motif de surface, au vu de la nature des produits concernés.
Selon la Cour, il ne peut être reproché au Tribunal de ne pas avoir déterminé les normes et habitudes des secteurs concernés, alors qu’il appartenait « à la partie requérante qui se prévaut du caractère distinctif d’une marque demandée (…) de fournir des indications concrètes et étayées établissant que cette marque est dotée soit d’un caractère distinctif intrinsèque, soit d’un caractère distinctif par l’usage ». Or, les quelques images de semelles intérieures de chaussures fournies par le déposant n’étaient pas, selon le Tribunal, « de nature à établir l’existence d’une divergence significative entre le signe litigieux et les normes et habitudes du secteur ».
L’on peut noter que la Cour d’appel de Paris a récemment accepté l’enregistrement de la marque figurative suivante pour les articles chaussants, en estimant que celle-ci se différenciait suffisamment des normes du secteur et présentait dès lors un caractère distinctif (Cour d’appel de Paris, 6 avril 2018, 2017/01742) :