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Loi n° 2019-775 du 24 juillet 2019 tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse

La France n’a pas attendu le délai du 7 juin 2021 laissé aux Etats membres pour transposer l’article 15 (ancien article 11) de la directive sur le droit d’auteur, qui instaure un droit voisin au profit des éditeurs de presse.

Ce temps record de transposition, qui fait de la France le premier Etat à transposer la mesure en droit national, était prévisible compte tenu de la forte mobilisation du Ministère de la culture et des parlementaire français en sa faveur. La directive sur le droit d’auteur n’était pas encore discutée au niveau européen que des sénateurs proposaient déjà d’introduire ce droit voisin, par voie d’amendements, dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine. Plusieurs propositions de loi ont par la suite été déposées, sans suite, jusqu’à l’inscription à l’ordre du jour de la commission de la culture du Sénat de la proposition de loi, qui a abouti à l’adoption de la loi n° 2019-775 du 24 juillet 2019 tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse.

Ainsi, à partir du 25 octobre, date de l’application effective de ce nouveau texte, plateformes, réseaux sociaux et autres sites agrégateurs d’informations devront obtenir l’autorisation de l’éditeur ou de l’agence de presse avant de procéder à toute reproduction ou communication au public, totale mais aussi partielle, de publications de presse. L’éditeur et/ou l’agence pourra prétendre à une rémunération en contrepartie. Jusqu’à présent, le régime juridique applicable octroyait aux éditeurs de presse un droit d’auteur sur la publication de presse dans son ensemble, ce qui rendait difficile la preuve de la contrefaçon et la mise en œuvre d’une action contre la publication de multiples extraits dont ils étaient à l’origine.

La loi fixe le mode de détermination de la rémunération due aux agences et éditeurs en prévoyant qu’elle est assise « sur les recettes de l’exploitation de toute nature, directes ou indirectes ou, à défaut, évaluée forfaitairement, notamment dans les cas prévus à l’article L. 131-4 ». Les parlementaires ont par ailleurs souhaité préciser que « la fixation du montant de cette rémunération prend en compte des éléments tels que les investissements humains, matériels et financiers réalisés par les éditeurs et les agences de presse, la contribution des publications de presse à l’information politique et générale et l’importance de l’utilisation des publications de presse par les services de communication au public en ligne ». Quant aux modalités de recueil et de répartition de la rémunération, le législateur français a choisi la gestion collective mais laisse les bénéficiaires libres d’y recourir.

Sur les caractéristiques du droit voisin, il a été opté pour une transposition a minima. Comme le prévoit la directive, la loi fixe la durée de ce droit à deux ans à compter du 1er janvier de l’année civile suivant celle de la première publication d’une publication de presse, ne couvre pas les publications périodiques à des fins scientifiques ou universitaires et, surtout, exclut de son champ d’application les actes d’hyperliens, les mots isolés et les « très courts extraits ».

Sur ce dernier point, beaucoup regrettent l’absence de seuil (nombre de mots) fixé par le législateur qui a privilégié une approche casuistique selon laquelle « cette exception ne peut affecter l’efficacité des droits ouvert » et précisant que « cette efficacité ? est notamment affectée lorsque l’utilisation de très courts extraits se substitue à la publication de presse elle-même ou dispense le lecteur de s’y référer ».

Cette absence de définition objective ainsi que le caractère illustratif des critères de détermination de la rémunération fait craindre pour l’efficacité du dispositif. Reste que des garanties ont été prévues tenant d’une part au recours aux mesures de protection prévues par le Code de la Propriété intellectuelle aux articles L.331-5 et suivants et aux sanctions pénales applicables en cas de violation, et d’autre part, aux obligations de transparence mises à la charge des services de communication au public en ligne à l’endroit des éditeurs et agences de presse concernant les modalités de calcul de la rémunération de leur droit voisin.

Enfin, sur la « part appropriée et équitable » de rémunération à revenir aux journalistes, la loi n’en fixe pas directement l’assiette, et renvoie à un accord spécifique négocié entre les organisations professionnelles, assistées, le cas échéant, d’une commission spécifiquement créée, à laquelle il reviendra la charge d’amener les parties à un compromis ou, à défaut, de prendre elle-même la décision. La priorité est donc aujourd’hui à l’aboutissement de ces négociations.

Pour le reste des articles de la directive, la transposition devrait également, d’après les annonces faites par le Ministre de la culture, intervenir prochainement. Le projet de loi audiovisuel, devrait comprendre une proposition de transposition de l’article 17 (ancien article 13) sur la reconnaissance et le filtrage des contenus, ainsi que des articles 18 à 22 sur la juste rémunération des auteurs et des artistes interprètes.

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