Une nouvelle décision, publiée au bulletin de la Chambre commerciale de la Cour de cassation (Décision du 25 février 2025, n° 23-50.012) est venue préciser que pour qu’un préavis de rupture soit valide, il est nécessaire que l’écrit par lequel une entreprise notifie son intention de ne pas poursuivre une relation commerciale établie (par exemple, l’annonce de la mise en compétition à venir par courrier) mentionne clairement la date à l’issue de laquelle la relation prendra fin si le candidat sortant n’était pas retenu.
Cette décision apporte également des clarifications en matière de charge de la preuve de la dépendance économique.
En l’espèce, une société active dans le secteur de la gestion des déchets et l’exploitation de stations d’épuration (la « Société SUEZ » – en demande au pourvoi) a décidé d’organiser un appel d’offres portant sur la mission relative au transport des déchets qu’elle produit.
L’entreprise qui jusqu’alors était en charge de cette mission (la « Société sortante ») est informée le 30 mars 2016 par courrier électronique adressé par la Société SUEZ de l’organisation de cet appel d’offres. Elle décide d’y candidater.
A l’issue de l’appel d’offres organisé, la Société sortante n’est pas retenue et en est informée par la Société SUEZ par courrier reçu au cours du mois de janvier 2017, annonçant un terme de la relation commerciale au 1er décembre 2017.
Précisons que la Société sortante, s’estimant en dépendance économique vis-à-vis de la Société SUEZ, considérait que le préavis de 10 mois qui lui avait été accordé était insuffisant.
Les faits étant antérieurs à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, c’est sous l’égide des dispositions de l’article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce anciennement rédigé que cette affaire a été jugée.
- Concernant les modalités de remise du préavis :
Après avoir rappelé les termes de l’arrêt d’appel qui, selon la Cour de cassation, « énonce exactement que l’écrit par lequel une entreprise notifie son intention de ne pas poursuivre une relation commerciale établie ne fait courir le préavis dû à l’entreprise qui subit la rupture que s’il précise à quelle date la relation prendra fin », la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par la Société SUEZ au motif que « la cour d‘appel a exactement retenu que le préavis de rupture n’avait pas pu commencer à courir avant janvier 2017 ».
- Concernant la charge de la preuve de la dépendance économique
La Société Sortante faisant état d’un chiffre d’affaires réalisé avec la Société SUEZ oscillant entre 86 et 72 % environ au cours des trois dernières années de la relation, s’estimait en état de dépendance économique.
Sur ce point, il est clairement rappelé par cette décision que « l’état de dépendance résulte de l’impossibilité pour la partie qui subit la rupture de la relation commerciale établie de disposer, au moment de cette rupture, auprès d’une ou plusieurs entreprises, d’une solution techniquement et économiquement équivalente aux relations contractuelles qu’elle a nouées avec l’entreprise qui a pris l’initiative de la rupture. »
Dès lors, « Il appartient à celui qui invoque les dispositions de l’article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, d’établir l’état de dépendance dans lequel il se trouvait vis-à-vis de son cocontractant au moment de la rupture. Cet état de dépendance ne peut se déduire exclusivement de l’importance de la part du chiffre d’affaires réalisée avec l’entreprise auteur de la rupture ».