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TGI Paris, 3ème Ch., 2ème Sect., 25 octobre 2013- ADAMI c/SPEDIDAM

A la différence de la plupart des pays européens, les titulaires de droits voisins, artistes et producteurs ne sont pas réunis dans une société unique pour l’exercice des droits qu’ils tiennent de la loi.

Les artistes et musiciens, notamment, sont représentés par deux sociétés de gestion collective, l’ADAMI et la SPEDIDAM, qui collectent la rémunération équitable et la rémunération pour copie privée par l’intermédiaire des sociétés dont elles sont membres, la SPRE et Copie France, avant de les répartir à leurs membres.

L’ADAMI a été fondée en 1955 pour percevoir les rémunérations complémentaires dues aux artistes-interprètes en application des accords collectifs et la SPEDIDAM a été créée en 1959 afin de percevoir et répartir les rémunérations complémentaires dues aux musiciens d’accompagnement en application des accords collectifs conclus avec les producteurs de phonogrammes.

En instituant deux licences légales, la rémunération équitable et la rémunération pour copie privée, la loi du 3 juillet 1985 a considérablement augmenté le champ d’activité de ces sociétés et les sommes qu’elles perçoivent ; elles n’ont pas été en mesure néanmoins depuis lors, de s’entendre sur les règles de répartition des sommes collectées.

En 1987 une sentence arbitrale a tenté de régler la situation en déterminant la compétence des deux sociétés et les clés de partage des rémunérations.

Cette sentence arbitrale n’a pas été réellement exécutée et elle a été contestée, l’une des sociétés formant une demande en annulation et la seconde une demande en interprétation, deux procédures menées sans succès jusqu’à la Cour de cassation.

Les deux sociétés se sont toutefois rapprochées en 2004 et ont conclu un protocole d’accord convenant de la caducité de la sentence arbitrale, prévoyant la constitution d’une société commune et déterminant des règles de détermination des systèmes de répartition.

Les deux sociétés se sont, en revanche, pas parvenues à définir des règles de répartition pérenne.

Ces désaccords ont conduit l’ADAMI à résilier le protocole d’accord en décembre 2008 avec un préavis de six mois.

Le Tribunal a été saisi du désaccord sur les conditions d’exécution du protocole d’accord et les conséquences de sa résiliation.

Après quatre ans de procédure ponctués de tentatives de médiation et de conciliation, le Tribunal a renvoyé les deux parties dos à dos, en refusant de se prononcer sur les règles de partage et rémunération.

Le Tribunal a ainsi jugé que le protocole d’accord, d’une durée indéterminée, pouvait être résilié à la demande de l’une des parties, en respectant un délai de préavis suffisant. Il a, en revanche, jugé qu’il ne lui appartenait pas de déterminer si les clés de répartition prévues au protocole étaient provisoires ou définitives, dès lors qu’elles avaient été approuvées par les deux parties, pas plus qu’il ne lui appartenait de déterminer des règles de répartition pour l’avenir.

Le Tribunal déboute donc l’ADAMI et la SPEDIDAM des demandes en remboursement de trop perçu formées par les deux sociétés ainsi que de détermination des règles applicables pour la répartition des sommes depuis la résiliation du protocole d’accord.

Si, sous réserve de l’appréciation de la Cour d’appel, le jugement met fin aux contestations sur les répartitions passées des rémunérations, il place les deux sociétés dans une situation très inconfortable ; depuis 2009, il n’existe pas de règle de répartition entre les deux sociétés et la prudence devrait donc les conduire à limiter le montant des sommes réparties à leurs membres, compte tenu des risques d’une remise en cause de règles de répartition qui n’ont, aujourd’hui, aucun fondement juridique.

L’on sait que la Directive européenne visant à encadrer l’activité des sociétés de gestion collective est en cours de formalisation à Bruxelles et que ces sociétés se félicitent de la reconnaissance de la gestion collective comme un moyen privilégié de gérer les droits des auteurs et des artistes. Compte tenu de l’ouverture à la concurrence que prévoit la Directive et donc de la possible augmentation du nombre des intervenants, l’on peut sans doute souhaiter que la loi donne expressément compétence aux Tribunaux pour déterminer le montant des rémunérations et leurs règles de répartition en l’absence d’accord.

Eric LAUVAUX

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