La question se complique un peu pour les commissions générées non par une activité effective, mais indirectement. Telle était l’une des questions posées à la Cour de cassation dans cet arrêt concernant des commissions sur ordres indirects, c’est-à-dire sur les commandes passées non par la salariée à l’occasion d’une visite chez un client mais via des centrales d’achat.
En demande, la salariée faisait valoir que les commandes indirectes passées par les clients résultaient au moins pour partie de son action commerciale, en l’espèce son travail de prospection et de présentation. Sans contredire ce point mais pour contourner l’argument, la société opposait que les commissions sur ces ordres étaient maintenues pendant les heures de délégation et que les intégrer de nouveau à l’assiette de calcul conduirait i) à les rémunérer deux fois et ii) à une rémunération des heures de délégation supérieure à celle que la VRP aurait perçu si elle avait travaillé normalement.
La Cour a écarté les deux arguments en assénant pour toute réponse « la rémunération des heures de délégation devait être calculée en prenant en compte l’intégralité des commissions perçues par la salariée, peu important qu’elles aient été générées par des ordres directs ou des ordres indirects ».
Fin de la discussion ? Peut-être pas.
En l’espèce, l’employeur exposait comme moyen de cassation le fait que la Cour d’appel n’avait « pas expliqué en quoi l’intégration n’avait pas pour effet de commissionner deux fois le salarié ». La Haute Cour n’a pas plus répondu à ce défaut de réponse à grief. On peut supposer qu’elle a estimé que la charge de la preuve reposait sur la société et que ce n’était pas à la Cour d’appel de faire une démonstration incombant à l’employeur. On peut aussi supposer que la Cour n’a pas souhaité entrer dans une analyse factuelle exclue de son champ de compétence et réservée à l’appréciation souveraine des juges du fond.
Que diraient les juridictions à un employeur qui démontrerait que son système comptable garantit le principe d’intégration des ordres indirects ? Selon nous probablement que ce dernier est conforme à la Loi. En ce sens nous ne pouvons que recommander une méthode mettant en avant une addition plutôt qu’une soustraction, fût-elle compensée par un maintien préalable…
Zoom sur les temps de trajet inhabituels.
Rappelons déjà que les temps de trajet ne sont pas des temps de travail effectif. L’article L.3121-4 l’indique sans ambiguïté. Mais il ajoute que si ce temps excède la durée normale du trajet domicile-lieu de travail, il doit faire l’objet « d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière ».
Dans l’arrêt examiné ici, la salariée demandait le paiement i) de la fraction des heures de trajet que l’employeur avait écartée et ii) sur la base de la même assiette que celle retenue pour les heures de réunion. La Chambre sociale valide la Cour d’appel qui avait débouté la salariée sur le premier point ; les pièces justificatives reconstituant les trajets produites par l’employeur démontrant que les horaires avancés par la salariée étaient contestables. Solution « classique » mais rassurante. Sur le second point, la Haute Cour censure à l’inverse la décision d’appel qui avait condamné l’employeur.
Dès lors que la Loi évoque une simple compensation à l’exclusion de toute notion de salaire ou de rémunération d’une part et que la société avait d’autre part respecté les modalités légales de fixation, son système de compensation – sur la base du minimum conventionnel – est validé.
Le présent arrêt qui se penche de façon précise sur ce dispositif légal, appliqué aux heures de délégation, méritait bien l’attention, tant ces thématiques sont sources de crispations dès lors que l’entreprise s’adresse à des salariés protégés.
Virginie DELESTRE