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Par référendum, les britanniques ont voté en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne. Si cette sortie n’est pas immédiate, il est acquis que le Royaume-Uni ne sera plus soumis au droit communautaire à compter du moment où elle sera actée. Directives et règlements de l’Union ne lieront plus le législateur britannique, ce qui permettra l’éclosion de nouvelles divergences avec le droit des Etats membres. De même, la perte du statut d’Etat membre entrainera de facto des conséquences pour les Etats membres dans leurs relations avec les entreprises établies au Royaume-Uni. L’on peut ainsi relever quelques exemples des conséquences prévisibles en France.

Licences et épuisement du droit

L’on peut relever deux conséquences découlant directement du fait que le territoire du Royaume-Uni ne sera plus un territoire de l’Union Européenne.

Il conviendra à l’occasion de la négociation et rédaction de contrats de licence multiterritoriales (aussi bien pour une œuvre qu’un enregistrement, une marque ou un brevet) notamment si celle-ci couvre les Etats membre de l’Union Européenne, de s’assurer de la volonté des parties concernant le Royaume-Uni.

En outre, le principe d’épuisement du droit de distribution ne devrait plus s’appliquer aux produits protégés par un droit de propriété intellectuelle mis en circulation au
Royaume-Uni. Ainsi, en l’absence d’épuisement international, le titulaire du droit pourrait interdire l’importation sur les territoires de l’Union des produits dont il a seulement autorisé la vente au Royaume-Uni. Réciproquement, une mise sur le marché commun de l’Union ne permettrait pas d’exporter vers le Royaume-Uni sans autorisation préalable du titulaire de droit.

Copie privée

Bien que prévue par la directive 2001/29, l’exception de copie privée n’a été introduite au Royaume-Uni qu’en 2014. Celle-ci ne prévoyant pas de rémunération au bénéfice des ayants-droit en contrepartie comme le commande la directive (v. CJUE 9 juin 2016 aff. C470/14), elle a été annulée par la juridiction administrative anglaise en juin 2015.

A compter de sa sortie de l’Union, le Royaume-Uni pourrait alors envisager de remettre en place l’exception de copie privée sans rémunération. Les modalités de l’exception ne dépendraient plus de la compatibilité avec la directive 2001/29, et le Royaume-Uni pourrait à nouveau ouvrir la possibilité de réaliser des copies d’œuvres et enregistrements d’ayants droit (notamment français) à des fins d’usage privé sans que ceux-ci puissent récupérer la compensation prévue en droit français et communautaire. Pour autant, les ayants-droit britanniques auraient toujours droit à leur part de la rémunération pour copie privée perçue en France.

Il conviendra néanmoins de s’accorder avec la Convention de Berne, dont le Royaume-Uni est signataire, et dont l’article 9 prévoit que les exceptions aux droits de reproduction ne doivent pas porter atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre et ni causer un préjudice injustifié aux auteurs.

Droit de suite

Le droit de suite a été introduit tardivement en droit britannique, soit en 2006 suite à l’adoption de la directive 2001/84, et malgré la faculté ouverte dès 1948 par la Convention de Berne. Cette introduction avait fait l’objet de nombreuses critiques outre-manche concernant les possibles conséquences sur le marché de l’art en Angleterre (qui est encore aujourd’hui l’une des places fortes de ce marché dans le monde).

Certains commentateurs envisagent ainsi que le Royaume-Uni puissent choisir de supprimer le droit de suite afin de renforcer encore la compétitivité de son marché de l’art, au détriment des auteurs dont la revente des œuvres ne donnerait plus lieu à rémunération à leur profit.

Quotas dans la réglementation en matière audiovisuelle

La loi du 30 septembre 1986, complétée par les décrets de 2010, régit notamment les obligations qui incombent aux diffuseurs en matière de promotion et de contribution au financement de la production française et européenne. La réglementation prévoit ainsi des quotas d’investissement dans des œuvres audiovisuelles et cinématographiques européens, ainsi que des quotas de diffusion de ces œuvres.

A compter la sortie du Royaume-Uni de l’Union, les œuvres produites au Royaume-Uni ne relèveront plus de la qualification d’œuvre européenne et ne pourront plus entrer dans les quotas des diffuseurs. La nécessité de garantir la qualification d’œuvre européenne afin de remplir les quotas devrait amener à revoir les schémas de production, voire rediriger certains investissements vers des productions françaises.

Activité des agents

La perte de la citoyenneté européenne pour les ressortissants britanniques entraine une conséquence non négligeable en matière de spectacle vivant : la venue des artistes britanniques en France nécessitera notamment l’obtention d’un Visa, dont les délais de délivrance et le coût compliquent déjà la tâche des tourneurs d’artistes internationaux hors européens.

Les agences de mannequin britanniques pourraient également voir l’exercice de leur activité en France se compliquer. En tant qu’agences établies sur le territoire d’un Etat membre qui n’exercent pas une activité régulière en France, elles n’ont actuellement pas l’obligation d’obtenir une licence d’exploitation française, mais une fois la sortie de l’Union actée, elles pourraient être contraintes d’obtenir le sésame pour toute activité, même occasionnelle, ainsi que de constituer une garantie financière en France pour exercer leur activité sur le territoire français.

Les agents artistiques britanniques, quant à eux, pourront continuer d’assister un artiste en France, l’activité n’étant plus soumise à licence obligatoire depuis 2011, et compte tenu de la suppression de l’inscription au registre national des agents artistiques depuis le 1er janvier 2016.

Options pour l’après Brexit

Il conviendra de rester attentif aux négociations entre l’Union Européenne et le Royaume-Uni concernant la mise en œuvre du Brexit afin d’en saisir toutes les conséquences. Ainsi, le Royaume-Uni pourrait notamment choisir de rejoindre l’Espace Economique Européen (à l’instar de la Norvège, de l’Islande et du Liechtenstein), ou bien d’opter pour la conclusion de traités bilatéraux avec l’Union Européenne (à l’instar de la Suisse).

Loïc FOUQUET

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Ayant eu connaissance d’une campagne publicitaire nationale visant à faire la promotion des chaussures de la marque KICKERS et reprenant, au sein de ses visuels, les termes « FOREVER YOUNG », il a assigné le distributeur des produits KICKERS en France.

 

Ses demandes ayant été rejetées par le tribunal de grande instance de Rennes, la société BRUNO SAINT HILAIRE, a formé appel de la décision et la Cour d’appel de Rennes, saisie du litige, permet ainsi d’enrichir la jurisprudence déjà fournie sur la protection des slogans publicitaires par le droit des marques.

 

La validité des dépôts de slogans à titre de marque a parfois été contestée, en raison de leur nature évocatrice. Malgré cela, les tribunaux sont souvent réticents à considérer qu’un slogan ne peut, per se, être déposé en tant que marque, l’article L711-1 du Code de la propriété intellectuelle listant parmi les signes pouvant être déposés en tant que marque les « dénominations sous toutes les formes » dont notamment les « assemblages de mots ».

 

Cependant, même déposé, il peut souvent s’avérer difficile pour les titulaires de ces marques d’obtenir une protection sur le fondement du droit des marques, comme l’illustre notamment cet arrêt.

 

En l’espèce, si la validité du dépôt en tant que marque du signe Image de la marquen’était pas contestée ici, le litige portait sur la réalité de l’usage.

 

L’article L714-5 du Code de la propriété intellectuelle énonce en effet qu’ « encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans juste motif, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans ».

 

La société BRUNO SAINT HILAIRE, à qui était opposée l’absence d’usage sérieux du signe Image de la marque, avait soutenu qu’elle utilisait sa marque, en produisant des « photographies de 4 personnes portants des vêtements et chaussures avec la mention Forever Y au-dessus de la marque Saint Hilaire », ou encore « la présentation d’un homme habillé sur un solex devant un panneau où figure les mêmes éléments et alors qu’il constitue un stand publicitaire (…) ». Elle reconnaissait néanmoins que ce signe était utilisé comme concept, ce qu’indiquait d’ailleurs son site : « Forever Y, c’est tout un état d’esprit… avoir confiance en soi, se sentir bien et libre, oser passer à l’acte… être Forever Y ».

 

La Cour d’appel de Rennes a estimé que le signe n’était dès lors pas utilisé dans une fonction d’identification de l’origine des produits, et a prononcé la déchéance de la marque à compter du 1er décembre 2013.

 

 

Si la contrefaçon n’était pour autant pas de facto écartée à ce stade, les actes argués de contrefaçon datant de septembre 2010, la contestation de l’usage effectif à titre de marque a s’est avérée efficace.

 

La Cour d’appel note que le signe FOREVER YOUNG avait été utilisé « dans le cadre des 40 ans de la marque KICKERS », « au sein d’une phrase écrite en langue anglaise, traduite ensuite en langue française », de manière descriptive « de la marque KICKERS éternellement jeune ». Elle estime, par conséquent et de manière plutôt cohérente avec la déchéance prononcée, que là aussi, ces mots étaient utilisés à titre d’expression courante et non à titre de marque. Aucun usage du signe à titre de marque n’ayant été réalisé antérieurement au 1er décembre 2013, la demande sur le fondement de la contrefaçon a par conséquent été rejetée.

 

Sur les demandes formées sur le fondement de la concurrence déloyale, la Cour confirme également le jugement, en estimant que la société BRUNO SAINT HILAIRE ne justifiait pas d’investissement ou de travail particulier pour développer le « concept » FOREVER YOUNG, dont la « valeur économique individualisée » n’était, selon la Cour, pas démontrée.

 

Antoine JACQUEMART

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