Après 3 ans d’ancienneté dans l’entreprise et six ans d’activité professionnelle, tout salarié peut prendre un congé sabbatique d’une durée de six à onze mois, et est assuré de retrouver, à l’issue de ce congé, « son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente ».
Dans cette affaire soumise à la Cour de cassation, une salariée de Chanel Parfums Beauté avait pris un congé sabbatique de 11 mois. Dès avant son départ en congé, l’employeur l’avait informée qu’elle serait remplacée en mobilité interne par une autre salariée. A son retour, Chanel Parfums Beauté lui avait fait diverses propositions d’affectation, que la salariée avait toutes refusées. La société l’avait donc licenciée, et la salariée avait contesté son licenciement, faisant valoir, entre autres, que Chanel aurait dû pallier son absence par un recrutement temporaire.
L’arrêt de la Cour de cassation précise tout d’abord qu’à l’issue du congé sabbatique le salarié doit retrouver son précédent emploi, ou, à défaut, un emploi similaire. Ce qui est plus contraignant que l’application littérale du Code du travail : ce n’est que si le poste n’est plus disponible que l’employeur peut proposer un emploi similaire. Si le poste est toujours disponible, c’est dans ce poste que le salarié doit être affecté à son retour.
Ensuite la Cour de cassation indique que, dès lors que le précédent emploi occupé par la salariée n’était plus disponible, et qu’elle avait refusé plusieurs propositions de poste présentant des caractéristiques similaires, le licenciement était justifié. Autrement dit, la Cour de cassation n’a pas suivi l’argumentation de la salariée qui prétendait que l’employeur aurait dû trouver une solution temporaire, et conserver son poste. Pourtant, la salariée faisait valoir qu’il était d’usage dans l’entreprise de recruter un CDD en pareille circonstance.
Il est donc possible de considérer en vertu de cet arrêt qu’il n’est pas nécessaire de remplacer le salarié par une solution temporaire (CDD, ou affectation temporaire d’un autre salarié) et qu’il est possible de pourvoir définitivement le poste du salarié dès le début de son congé sabbatique. Dans l’affaire Chanel Parfums Beauté, le poste avait été pourvu par mobilité interne, mais il serait possible de le pourvoir aussi en CDI.
Tout en donnant au salarié qui part en congé la garantie qu’il retrouvera, par priorité, son ancien poste, l’arrêt lui signifie également que l’employeur est libre, dès son départ, de pourvoir définitivement son poste. En clair, le salarié qui part en congé sabbatique n’est jamais assuré de retrouver son emploi.
Pour d’autres congés, le Code du travail reprend la même terminologie sur le fait que le salarié retrouve son emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente. C’est notamment le cas pour le congé pour création d’entreprise, le congé parental d’éducation, et même le congé de maternité. Il est donc possible que la solution dégagée par la Cour de cassation dans l’arrêt du 3 juin 2015 soit transposable pour tous ces congés. La Cour de cassation avait déjà retenu la même solution pour le congé parental d’éducation, en posant que la réintégration doit se faire en priorité dans le précédent emploi, et en condamnant l’employeur qui avait réintégré la salariée dans un autre emploi, alors que l’emploi qu’elle occupait précédemment était toujours disponible (Cass. soc. 19 juin 2013, 12-12758). A notre avis toutefois, il convient d’être prudent dans le cas du congé de maternité, a priori de courte durée, et particulièrement protégé.
Anne CIRET
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