Contrefaçon de marque : quand la célérité du défendeur exclut la faute
CA Versailles, Ch. 12, 8 janvier 2019
Une célèbre marque de sport alpin a constaté que l’un des participants à deux épreuves de Coupe de monde de ski en janvier et février 2015, portait l’un de ses modèles de casque sur lequel sa marque avait été retirée et remplacée par celle d’un concurrent, sponsor dudit skieur, un nouveau décor ayant également été apposé sur le casque.
La société titulaire de la marque décide alors d’assigner le sponsor en contrefaçon de marque en raison de la suppression de sa marque ainsi que pour actes de parasitisme.
Le Tribunal de grande instance déboute le titulaire de la marque qui interjette appel.
Au soutien de son action en contrefaçon, la société titulaire de la marque soutenait que les actes de contrefaçon consistant en la suppression de sa marque et dans la réalisation et l’application d’un décor sur la structure du casque ne pouvaient pas être le fait exclusif du skieur et qu’ils ne pouvaient avoir été réalisés que par un professionnel. Selon le titulaire de la marque, le sponsor devait vérifier le matériel de son sportif et, dès lors qu’il n’était pas responsable de la modification de la marque, il devait à tout le moins rompre immédiatement le contrat de sponsoring sans laisser le skieur porter ledit casque jusqu’en juin 2015.
La Cour, comme le Tribunal, rejette l’argumentation en relevant qu’à réception de la mise en demeure du titulaire de la marque alertant le sponsor des faits de contrefaçon, celui-ci avait mené une enquête interne qui avait abouti à la rupture du contrat de sponsoring avec le sportif en mai 2015, pour avoir porté un casque d’une autre marque que celle de son sponsor, seulement un peu plus de deux mois après réception de la mise en demeure. La Cour relève que si la rupture avait présenté un caractère abusif, le sportif n’aurait pas manqué de saisir les juridictions compétentes pour obtenir réparation de son préjudice, ce qui n’avait pas été le cas. Les juges d’appel retiennent en conséquence que l’appelante n’établit pas que le sponsor concurrent soit l’auteur de la suppression de la marque et de l’adjonction d’un nouveau décor, la seule existence du contrat de sponsoring n’induisant pas la connaissance des actes de contrefaçon.
La société appelante est également déboutée sur le fondement des actes de parasitisme. Elle reprochait à son concurrent d’avoir commercialisé un casque haut de gamme destiné à des compétitions de ski, reprenant le graphisme du casque qu’elle avait fabriqué. La Cour ayant constaté que ledit casque avait été commercialisé par le sponsor plus d’un an avant les faits litigieux, elle rejette les demandes sur ce chef.
La Cour déboute enfin le titulaire de la marque de sa demande subsidiaire en dommages et intérêts pour faute. L’appelante soutenait que la défaillance du sponsor à ses obligations découlant de son contrat de sponsoring signé avec le skieur lui avait causé un préjudice dont elle demandait réparation. La Cour retient qu’aucune faute ne saurait être retenue à l’encontre du sponsor. Aucun élément ne venait conforter la thèse selon laquelle le sponsor aurait fourni le matériel contrefaisant ou contribué à permettre sa réalisation, ou aurait laissé en toute connaissance de cause le skieur porter un casque modifié. Au contraire, le sponsor avait réagi aussitôt après avoir été informé des faits litigieux et avait mis fin et avec effet immédiat au contrat de sponsoring.