De l’effet des publications au Registre du Cinéma et de l’Audiovisuel (RCA)

TGI Paris, 11 décembre 2015

Dans cette affaire, l’héritière d’un réalisateur a intenté une action en contrefaçon, suite à la diffusion d’un film sur une chaîne de télévision, au motif que les droits de diffusion n’avaient pas été valablement cédés.

Dans ce cadre, la demanderesse et les défendeurs ont présenté à la juridiction deux chaînes de droits différentes. Chacune débutait par un contrat de cession de droits d’auteur-réalisateur différent, signé en 1970, et comportant deux différences majeures.

Le contrat présenté par l’héritière, signé en avril 1970, contenait une cession de droits pour une durée de 15 ans, et avait été publié au RCA seulement quelques semaines après sa signature.

A l’inverse, le contrat présenté par les défendeurs, signé en juin 1970, contenait une cession de droits pour une durée de 50 ans. Mais ce document n’avait été publié au RCA qu’en 2003, soit 33 ans après sa signature et 4 ans après le décès de l’auteur-réalisateur.

Après avoir étudié les deux chaînes de contrats présentées par les parties et leur date de publication respective, les juges du fond ont tout d’abord rappelé qu’une inscription au RCA ne constituait qu’une formalité de publicité, et qu’elle n’entraînait aucun effet sur la validité du document.

Ils ont ensuite pris en compte divers éléments pour estimer que la seconde cession de droits d’auteur n’était pas valable.

La juridiction a tout d’abord relevé que le second contrat d’auteur avait été publié 33 ans après sa signature et 4 ans après le décès de l’auteur, contrairement à tous les autres actes contemporains relatifs à cette œuvre qui avaient été enregistrés dans les mois suivant leur signature.

Il a également été souligné que l’auteur avait pour habitude de signer des cessions de droit d’une durée de 10, 15 ou 25 ans, alors que le second contrat litigieux portait sur une durée inhabituelle de 50 ans.

Par ailleurs, le tribunal a relevé la contradiction entre les deux cessions de droits d’auteur et considéré que l’auteur n’avait de toutes façons pas pu légitimement céder ses droits une seconde fois, deux mois plus tard.

Les juges du fond ont enfin relevé d’autres anomalies dans la seconde chaîne de droits présentée par les défendeurs, qui ont été condamnés à indemiser la demanderesse.

Camille BURKHART

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Ayant eu connaissance d’une campagne publicitaire nationale visant à faire la promotion des chaussures de la marque KICKERS et reprenant, au sein de ses visuels, les termes « FOREVER YOUNG », il a assigné le distributeur des produits KICKERS en France.

 

Ses demandes ayant été rejetées par le tribunal de grande instance de Rennes, la société BRUNO SAINT HILAIRE, a formé appel de la décision et la Cour d’appel de Rennes, saisie du litige, permet ainsi d’enrichir la jurisprudence déjà fournie sur la protection des slogans publicitaires par le droit des marques.

 

La validité des dépôts de slogans à titre de marque a parfois été contestée, en raison de leur nature évocatrice. Malgré cela, les tribunaux sont souvent réticents à considérer qu’un slogan ne peut, per se, être déposé en tant que marque, l’article L711-1 du Code de la propriété intellectuelle listant parmi les signes pouvant être déposés en tant que marque les « dénominations sous toutes les formes » dont notamment les « assemblages de mots ».

 

Cependant, même déposé, il peut souvent s’avérer difficile pour les titulaires de ces marques d’obtenir une protection sur le fondement du droit des marques, comme l’illustre notamment cet arrêt.

 

En l’espèce, si la validité du dépôt en tant que marque du signe Image de la marquen’était pas contestée ici, le litige portait sur la réalité de l’usage.

 

L’article L714-5 du Code de la propriété intellectuelle énonce en effet qu’ « encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans juste motif, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans ».

 

La société BRUNO SAINT HILAIRE, à qui était opposée l’absence d’usage sérieux du signe Image de la marque, avait soutenu qu’elle utilisait sa marque, en produisant des « photographies de 4 personnes portants des vêtements et chaussures avec la mention Forever Y au-dessus de la marque Saint Hilaire », ou encore « la présentation d’un homme habillé sur un solex devant un panneau où figure les mêmes éléments et alors qu’il constitue un stand publicitaire (…) ». Elle reconnaissait néanmoins que ce signe était utilisé comme concept, ce qu’indiquait d’ailleurs son site : « Forever Y, c’est tout un état d’esprit… avoir confiance en soi, se sentir bien et libre, oser passer à l’acte… être Forever Y ».

 

La Cour d’appel de Rennes a estimé que le signe n’était dès lors pas utilisé dans une fonction d’identification de l’origine des produits, et a prononcé la déchéance de la marque à compter du 1er décembre 2013.

 

 

Si la contrefaçon n’était pour autant pas de facto écartée à ce stade, les actes argués de contrefaçon datant de septembre 2010, la contestation de l’usage effectif à titre de marque a s’est avérée efficace.

 

La Cour d’appel note que le signe FOREVER YOUNG avait été utilisé « dans le cadre des 40 ans de la marque KICKERS », « au sein d’une phrase écrite en langue anglaise, traduite ensuite en langue française », de manière descriptive « de la marque KICKERS éternellement jeune ». Elle estime, par conséquent et de manière plutôt cohérente avec la déchéance prononcée, que là aussi, ces mots étaient utilisés à titre d’expression courante et non à titre de marque. Aucun usage du signe à titre de marque n’ayant été réalisé antérieurement au 1er décembre 2013, la demande sur le fondement de la contrefaçon a par conséquent été rejetée.

 

Sur les demandes formées sur le fondement de la concurrence déloyale, la Cour confirme également le jugement, en estimant que la société BRUNO SAINT HILAIRE ne justifiait pas d’investissement ou de travail particulier pour développer le « concept » FOREVER YOUNG, dont la « valeur économique individualisée » n’était, selon la Cour, pas démontrée.

 

Antoine JACQUEMART