Les titulaires de marques ne pourront que se réjouir de la décision rendue par la cour d’appel de Paris, réaffirmant une jurisprudence constante selon laquelle il appartient à un organe de presse de prendre les mesures nécessaires pour que l’emploi d’une marque dans des articles de presse, n’entraine pas une dégénérescence de celle-ci.
Dans cette affaire, la société MECCANO, notamment titulaire de deux marques éponymes pour désigner entre autres des jeux et jouets, avait assigné la société d’exploitation du magazine Le Point pour avoir employé dans onze articles à compter de 2006 et jusqu’en 2012, le signe « Meccano ». La société Meccano considérait que l’emploi de la marque « MECCANO » au sein des articles, comme « nom commun signifiant un système d’assemblage, mécanisme, construction » était impropre et de nature à diluer le pouvoir distinctif de la marque.
En défense, la société d’exploitation du magazine Le Point faisait valoir qu’elle n’utilisait pas le terme « Meccano » comme un nom commun générique mais comme un mot ayant une valeur métaphorique renvoyant aux jeux de Meccano. Elle invoquait également un usage courant des signes dans les médias, sans majuscules ni guillemets, insusceptible de faire dégénérer une marque ou de la banaliser.
Alors que la société Meccano avait été déboutée de ses demandes en première instance, la cour d’appel de Paris infirme le jugement et condamne pour faute la société d’exploitation du magazine Le Point sur le fondement de l’article 1382 du Code civil.
La Cour relève que si généralement le terme « Meccano » est orthographié par la société d’exploitation Le Point comme un nom propre, il est toutefois employé comme un mot usuel du langage journalistique et il conceptualise une marque de jeu pour l’étendre à la désignation de toute sortes de systèmes de construction ou de montage architecturaux, intellectuels, politiques ou économiques, sans jamais indiquer qu’il s’agit d’un nom déposé. Ainsi, si le lecteur moyennement averti peut comprendre qu’il s’agit implicitement d’une référence à un jeu de construction connu, il ne saura pas forcément qu’il s’agit d’un signe protégé, aucune mention ne l’indiquant.
Selon les juges, « le public sera ainsi incité à croire …que le signe « Meccano » peut être utilisé de manière usuelle et généralisée », d’autant qu’il n’est pas nécessaire et peut être facilement remplacé par des mots tels que « assemblages », « construction », « jeu de construction » ou « dispositif » utilisés par les rédactions des autres organes de presse.
La cour rejette enfin l’argument de la société d’exploitation du magazine Le Point fondé sur le principe de la liberté de la presse. Elle considère qu’il ne saurait l’exonérer de son obligation de prudence pour éviter qu’un signe ne soit perçu par le lecteur non pas comme une marque déposée mais comme une métaphore ou un terme évocateur usuel synonymes de noms communs du langage courant. En sa qualité de professionnel, l’organe de presse ne peut ignorer l’importance économique d’une marque pour une société commerciale telle que Meccano.
Il convient de relever que la société Meccano avait pris soin d’adresser au magazine des mises en demeure pour les articles publiés.
Florence DAUVERGNE
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