Une association avait confié en 2002 à un prestataire un marché dont l’objet était la fourniture de progiciels de gestion comptable et financière et de prestations associées, notamment d’intégration. Ce prestataire avait commandé, livré et installé une suite de logiciels applicatifs de l’éditeur Oracle titulaire des droits d’auteurs sur ces logiciels. L’éditeur avait livré au prestataire un ensemble de logiciels vraisemblablement compris dans la suite commandée, et il revenait au prestataire d’installer les seuls logiciels pour lesquels l’association avait obtenu une licence.
L’éditeur des logiciels avait par la suite repris la succession du marché et l’intégralité des contrats de licence souscrits par l’association.
Peu avant la fin du marché, l’éditeur avait initié un audit portant sur l’utilisation des licences déjà concédées à l’association. En 2009, alors que l’association lançait un nouvel appel d’offre pour l’attribution d’un marché portant sur de nouvelles licences de logiciels, l’éditeur posait sa candidature et suspendait le cours de l’audit. Il reprenait néanmoins la procédure d’audit après que le marché ait été attribué à un tiers.
Selon l’éditeur, l’audit révélait des utilisations non autorisées d’un logiciel reproduit dans le support CD remis à l’association mais pour lequel aucune licence n’avait été concédée, l’éditeur soutenant que le logiciel en question ne faisait pas partie de la suite sur laquelle portaient les autorisations consenties. Il assignait l’association en contrefaçon, tandis que cette dernière appelait en garantie le premier prestataire.
In limine litis, l’association sollicitait un avis de l’Autorité de la concurrence sur les pratiques de l’éditeur quant à la mise en œuvre d’audits contractuels et l’introduction d’actions judiciaires qui visaient selon la défenderesse à influencer voire forcer la décision d’attribution du marché dans le cadre de l’appel d’offres. C’est également en considération de ces pratiques qu’elle demandait à titre reconventionnel la condamnation de l’éditeur à des dommages et intérêts pour abus de position dominante.
En défense au principal, elle se plaçait sur le terrain de la bonne foi contractuelle, et arguait du fait qu’elle s’était contentée d’exploiter les logiciels implantés par son prestataire, et que l’éditeur avait connaissance de l’utilisation qui était faite du logiciel.
La demande en contrefaçon sur le fondement du droit d’auteur et la défense sur le terrain de l’exécution de bonne foi du contrat n’étant pas conciliables, le juge retient en l’espèce les seules règles du code civil concernant l’exécution des contrats compte tenu du fait que le litige portait sur le périmètre du contrat et sur sa bonne ou sa mauvaise exécution.
Au terme de l’examen des conditions d’exécution du contrat, le tribunal relève la confusion entretenue par l’éditeur qui avait livré le logiciel litigieux avec les autres logiciels de la suite objet de la licence, faisant ainsi peser sur l’association et son prestataire la charge de vérifier si tous les logiciels livrés entraient dans le périmètre des autorisations concédées.
Le Tribunal estime que l’association avait exploité le logiciel sans aucune faute, « puisqu’il a été inclus dans les CD préparés » par l’éditeur « qui [a] donc toujours compris et admis que le contrat incluait l’exploitation de ce logiciel ».
Par ailleurs le tribunal rejette les demandes de l’association en vue de saisir l’Autorité de la concurrence et d’obtenir la condamnation à des dommages et intérêts pour abus de position dominante, faute pour la défenderesse de prouver la position dominante de l’éditeur. Bien qu’il rejette également les demandes de l’association tendant à condamner l’éditeur pour procédure abusive, le tribunal alloue à chacun des codéfendeurs la somme de 100.000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, à la charge de l’éditeur.
Loïc FOUQUET
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Confirmation en appel du statut d’éditeur d’un site de vente aux enchères et de parking de noms de domaine