L’extension de la licence légale aux webradios validée par le Conseil Constitutionnel

Conseil Constitutionnel Décision n°2017-649 QPC du 4 août 2017

Le Conseil Constitutionnel a validé la disposition de la loi Création étendant aux webradios le système de licence égale applicable aux radios hertziennes.

Aux termes de l’article L.214-1 CPI ainsi modifié, les artistes-interprètes et les producteurs ne peuvent s’opposer à la diffusion d’un phonogramme par un service de radio, cette diffusion donnant lieu au paiement d’une rémunération établie par une commission.

Au soutien de leur question préjudicielle, les producteurs avaient fait valoir que ces dispositions portaient atteinte au droit d’autoriser ainsi qu’à la liberté d’entreprendre. Ils ajoutaient que l’absence de dispositions transitoires portait atteinte au principe de sécurité juridique en ne traitant pas le sort des contrats en cours. Enfin, ils évoquaient une violation du principe d’égalité devant la loi.

Le Conseil Constitutionnel n’a pas retenu ces griefs mais la motivation rappelle la protection dont bénéficient les ayants droit.

Pour écarter le grief tenant à l’atteinte portée au droit de propriété, le Conseil constitutionnel rappelle les éléments d’appréciation. Il réaffirme que le droit garantit la jouissance par les titulaires de droits d’auteur et de droits voisins des droits de propriété intellectuelle que leur reconnaissent la loi et les traités, mais rappelle qu’il est loisible au législateur d’apporter au droit de propriété des limites si elles sont justifiées par l’intérêt général et ne sont pas disproportionnées.

Ainsi, est réaffirmé le droit pour les artistes et producteurs de négocier les conditions d’exploitation et de percevoir une rémunération définie par voie contractuelle. Les exceptions doivent être justifiées par l’intérêt général. En l’espèce, le Conseil Constitutionnel retient que la facilitation de l’accès favorisera la diversification de l’offre culturelle et que les mesures sont limitées, puisque sont exclus les services interactifs et ceux qui sont consacrés à un même artiste ou qui comportent des fonctionnalités permettant à l’utilisateur d’influencer le contenu du programme.

Le Conseil Constitutionnel retient également qu’une rémunération équitable est garantie car les barèmes sont établis par des accords spécifiques et à défaut par une commission administrative paritaire.

Sur ce point, le Conseil Constitutionnel relève que les nouvelles dispositions n’affectent pas les contrats légalement conclus avant leur entrée en vigueur. L’on peut penser, au regard de cette appréciation, que les conditions négociées entre les opérateurs auront vocation à être étendues par les accords collectifs et, à défaut d’accord, par la commission paritaire.

D’une manière générale, l’on relèvera que la motivation ne s’accompagne pas toujours d’une démonstration.

Ainsi, le Conseil Constitutionnel écarte le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi au seul motif « que les dispositions contestées n’instituent aucune différence de traitement » sans rappeler que l’article L.214-2 CPI réserve le paiement de la rémunération équitable aux phonogrammes fixés dans l’Union Européenne.

L’on peut être surpris que le Conseil Constitutionnel n’ait pas tenu compte du fait que les artistes étrangers à l’Union Européenne mais également les artistes français qui participent à la production d’un phonogramme à l’étranger seraient privés des rémunérations qui avaient été négociées, sauf à considérer que cette disposition de la loi, votée en 1985, qui exclut certains artistes du droit à une rémunération équitable, serait elle-même contraire à la Constitution.

Eric LAUVAUX

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