L’indemnité compensatrice de congés payés est due même en cas de faute lourde.

Décision du Conseil constitutionnel du 2 mars 2016, QPC 2015-523

C’est un principe ancien et constant de notre droit du travail que vient de battre en brèche le Conseil constitutionnel dans une décision rendue le 2 mars 2016.

Le droit du licenciement distingue en effet trois types de licenciement, selon la gravité de la faute : la faute simple (ou cause réelle et sérieuse), la faute grave et la faute lourde.

Cette dernière a la particularité d’être privative de toute indemnité, même l’indemnité compensatrice de congés payés (article L 3141-26).

Le législateur a toutefois prévu une exception : les salariés affiliés à une caisse de congés payés licenciés pour faute lourde bénéficient, par exception, d’une indemnité compensatrice de congés payés (article L 3141-28).

Le législateur justifiait cette dérogation au principe par le fait que les salariés affiliés à une caisse de congés payés étaient soumis à un travail discontinu et que la caisse de congés se substituait à l’employeur dans le versement des congés payés.

L’argument n’a pas convaincu la chambre sociale de la Cour de cassation qui par une décision du 2 mars 2016 a décidé de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au Conseil constitutionnel.

La question posée au Conseil était de déterminer si la loi pouvait traiter différemment les salariés licenciés pour faute lourde selon que l’employeur était affilié ou non à une caisse de congés payés.

Très logiquement, le Conseil a considéré que la différence de traitement entre les salariés licenciés pour faute lourde selon que l’employeur était affilié ou non à une caisse de congés payés ne se justifiait pas tant du point de vue des règles afférentes aux caisses de congés payés, que des règles propres à la faute lourde.

C’est donc le principe d’égalité qui a eu raison d’un principe ancien du droit du travail.

D’aucuns considèrent que la Cour de cassation et le Conseil constitutionnel ont opportunément saisi l’existence de la différence de traitement prévu par l’article L 3141-28 du Code du travail, pour aligner le droit français sur les règles issues de la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE).

En effet, la CJUE considère que « le droit au congé est un principe d’une importance particulière auquel il ne saurait être dérogé » « Le droit interne était donc, selon de nombreux commentateurs, contraire au droit européen.

La déclaration d’inconstitutionnalité prend effet dès la publication de la décision du 2 mars 2016 et peut-être invoquée dans toutes les instances judiciaires en cours et non jugées définitivement.

Khalil MIHOUBI

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