La Commission européenne autorise une acquisition dans le secteur des télécommunications sous la condition d’interdire un financement étranger
Le 10 juin dernier, la Commission européenne a ouvert une enquête approfondie s’agissant du projet d’acquisition par Emirates Telecommunications Group Company PJSC (ci-après « la société acquéreuse ») du contrôle exclusif de la société PPF Telecom Group B.V., à l’exclusion de son activité tchèque. En effet, la Commission européenne suspectait que la société acquéreuse ait pu bénéficier de subventions étrangères susceptibles de fausser le marché intérieur de l’Union européenne.
Pour rappel, le règlement relatif aux subventions étrangères[1] permet à la Commission européenne de lutter contre les distorsions dans le marché intérieur provoquées par des subventions étrangères afin de garantir des conditions de concurrence équitables, notamment dans le cadre de concentrations.
Au regard de l’article 20 du règlement susmentionné, une concentration est soumise à l’obligation de notification lorsque :
- au moins une des parties à la fusion établie dans l’Union génère un chiffre d’affaires total d’au moins 500 000 000 d’euros dans l’Union ; et
- dans le cas d’une acquisition, l’acquéreur ou les acquéreurs et l’entreprise acquise ont reçu de pays tiers des contributions financières totales cumulées de plus de 50 000 000 d’euros au cours des trois années précédant la conclusion de l’accord, l’annonce de l’offre publique d’achat ou d’échange, ou l’acquisition d’une participation de contrôle.
Concernant l’affaire rapportée ici, il résulte du communiqué du 24 septembre 2024 de la Commission que les informations recueillies durant l’enquête, notamment de la part de concurrents de PPF, ont permis à cette dernière d’observer que :
- La société acquéreuse et l’Emirates Investment Authority (fonds souverain placé sous le contrôle des Emirats arabes unis et contrôlant la société acquéreuse) ont bénéficié de subventions étrangères ;
- Les subventions étrangères reçues par la société acquéreuse n’ont pas eu d’effets négatifs réels ou potentiels sur la concurrence dans le cadre du processus d’acquisition ;
- Toutefois, les subventions étrangères reçues par les sociétés susmentionnées auraient pu entrainer une distorsion de la concurrence sur le marché intérieur de l’Union européenne postérieurement à cette acquisition (amélioration artificielle de la capacité de l’entité issue de la concentration à financer ses activités sur le marché intérieur de l’Union européenne et une immunisation plus importante contre les risques).
En conséquence, la société acquéreuse et l’Emirates Investment Authority ont proposé les engagements suivants :
- Une interdiction de tout financement provenant de ces dernières à l’égard des activités de PPF dans le marché intérieur de l’Union européenne sauf exceptions (activités hors de l’Union européenne et « financement d’urgence ») ;
- La suppression de la garantie d’Etat illimitée ;
- L’information obligatoire de la Commission s’agissant des futures acquisitions de la société acquéreuse (même si ce ne sont pas des concentrations soumises à l’obligation de notification prévue par le règlement susmentionné).
La Commission a répondu favorablement à ces engagements, qui selon Margrethe Vestager, constituent « une série complète de mesures correctives pour remédier à nos préoccupations ».
Ces engagements sont valables pour une durée de 10 ans, et peuvent faire l’objet d’une prolongation.
[1] Règlement (UE) 2022/2560 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur – entré en application le 12 juillet 2023