Par une ordonnance de référé du 24 janvier 2013 (Netcom février 2013) Twitter avait été condamnée à mettre en place un dispositif de signalement des contenus illicites, le Juge ayant relevé que Twitter n’avait pas spontanément mis en place un formulaire suffisamment accessible et visible pour permettre à toute personne de porter à la connaissance de Twitter ses contenus et ses revendications.
Le Juge avait donc ordonné la mise en place d’un système plus simple et complet, cette mesure devant consister a minima dans la mise en place d’un onglet accessible depuis la page active du compte.
L’ordonnance comportait également l’obligation pour Twitter de communiquer les données des personnes titulaires des comptes litigieux. Twitter en a fait appel.
Cette décision étant exécutoire de plein droit, l’UEJF a saisi le premier président de la Cour d’appel afin de faire constater que Twitter ne s’était pas conformée aux mesures ordonnées, ne les avait pas exécutées et en conséquence, au visa de l’article 526 de Code de procédure civile, a sollicité la radiation de l’affaire.
Devant la Cour d’appel, Twitter faisait valoir qu’elle avait mis en place un dispositif accessible et visible, ce que contestait l’UEJF.
Le cheminement pour aviser la société Twitter de contenus illicites suppose plusieurs clics. Si les internautes sont habitués à cliquer, encore faut-il qu’ils puissent facilement savoir où la dénonciation de contenus illicites peut-être faite.
Or, pour ce faire, il est nécessaire d’aller dans la rubrique « Aide » pour commencer le cheminement, rubrique dont les caractères d’écritures sont très petits et dont la visibilité et le contenu ne peuvent être clairs dès lors que cette rubrique vise non seulement l’aide technique mais aussi toutes les questions susceptibles de se poser à propos de Twitter. Ce n’est donc que sur la page suivante et non pas sur une seule et même page rattachée au contenu contesté que l’on voit apparaître la notion de comportement abusif.
Les propositions qui sont faites pour dénoncer les contenus litigieux visent pour l’essentiel des usages faits par d’autres des tweets et il n’est nullement évoqué la possibilité de dénoncer les contenus illicites au terme du cheminement.
Enfin, la Cour note que les informations relatives aux tweets litigieux entrent dans la catégorie « message offensant » mais que la personne qui dénonce à Twitter un tel message se voit exposer d’office à ce que Twitter avise la personne qui a twitté le message illicite.
En conséquence, la Cour estime que le dispositif mis en place pour porter à la connaissance de Twitter le contenu illicite, notamment ceux tombant sur le coup de l’apologie des crimes contre l’humanité et de l’incitation à la haine raciale n’est pas en l’état accessible et visible. Elle estime donc que Twitter ne démontre pas avoir exécuté la première injonction qui lui a été donnée par le juge des référés.
S’agissant de la seconde injonction, Twitter s’est opposé à la communication des données en prétendant que cette communication ne devait être effectuée que sous conditions de son caractère irréversible, qui la priverait du double degré de juridiction. La Cour écarte ce motif jugé non sérieux. Elle estime qu’il n’y a aucune conséquence manifestement excessive justifiant le refus par Twitter d’exécuter la décision.
La Cour relève en outre que la communication des données, si elle est irréversible, ne prive pas la personne qui a la charge d’exécuter cette injonction d’obtenir, en appel et en cas d’infirmation, une condamnation au paiement de dommages et intérêts de la personne qui a souhaité faire exécuter les mesures provisoires.
La Cour relève en outre, qu’au cas d’espèce, les propos litigieux relevant, notamment, de la qualification de diffamation, il est requis des associations d’agir au pénal dans le délai de prescription de trois mois en vertu des dispositions de la loi du 29 juillet 1881. Ceci justifie d’autant plus la mesure ordonnée. Twitter ne démontre pas là non plus, même à supposer des poursuites aux Etats-Unis, qu’elle ne pourrait pas réclamer d’indemnisation du préjudice subi de ce chef, alors que les associations bénéficiaires sont, elles, susceptibles de perdre la possibilité d’agir du fait de la prescription.
Twitter n’aura donc pas la possibilité de contester les motifs de l’ordonnance du 24 janvier 2013 et de faire trancher cet appel compte tenu de sa réticence à exécuter les mesures ordonnées.
Armelle FOURLON
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