Le postulat est évident, mais face à l’immense succès d’un film les appétits financiers s’aiguisent … A ce sujet la Cour d’appel de Paris vient de rappeler clairement la nature de la mission dévolue à un assistant-réalisateur.
Dans cette affaire, un « assistant réalisateur adjoint » d’un film français (ayant connu un succès sans précédent), qui estimait ne pas avoir reçu la « contrepartie légale ni morale » de la réussite du film, a assigné la production afin de se voir reconnaître la qualité d’auteur-réalisateur d’un certain nombre de scènes et de se voir attribuer les rémunérations correspondantes…
La Cour a confirmé la décision du Tribunal de Grande Instance de Paris, qui avait retenu que le demandeur ne démontrait pas avoir eu un rôle autre que celui confié à un technicien, ni avoir marqué de sa personnalité les scènes revendiquées.
L’assistant-réalisateur concluait une nouvelle fois en appel à l’originalité d’un certain nombre de scènes en prétendant n’avoir disposé que des indications données par le scénario et avoir opéré lors du tournage « des choix temporels, techniques et esthétiques portant l’empreinte de sa personnalité ».
Après avoir énoncé que l’intéressé ne pouvait « se prévaloir du bénéfice de la présomption légale de la qualité de co-auteur attachée à la qualité de réalisateur de l’ensemble de l’œuvre audiovisuelle » et qu’il devait rapporter la preuve d’un apport original, la Cour d’Appel a procédé, scène par scène, à une analyse in concreto de la nature des contributions revendiquées.
La Cour d’Appel a ainsi successivement estimé qu’il s’agissait « d’une prestation d’exécution », « de la mise en œuvre de choix techniques destinés à illustrer le scénario », de la traduction de « l’expérience d’un professionnel du tournage de scènes comportant un véhicule en mouvement », « d’un travail purement technique de tournage », et que l’intéressé ne démontrait pas avoir pris « des initiatives ou responsabilités qu’un technicien (…) ne serait pas en mesure normalement de prendre et qui conférerait à sa prestation une part créatrice dans le film ».
En définitive, la Cour a très clairement énoncé « que si les séquences revendiquées, insérées dans le film, traduisent les instructions du scénario en plans filmés, elles relèvent de contraintes imposées et les choix de l’appelant ne s’avèrent pas suffisants pour caractériser un réel apport créatif au sens du droit d’auteur ».
La Cour a également retenu que la mention du nom de l’intéressé sur des claps de tournages « ne suffit pas à établir sa qualité de réalisateur au sens de l’article L.113-7 du Code la Propriété Intellectuelle ».
En outre le fait que la production ait adressé une autorisation d’exploitation à l’intéressé (par ailleurs engagé, indépendamment de ses fonctions d’assistant, en qualité d’artiste-interprète) ne permettait pas de déduire que la production reconnaissait sa qualité d’auteur « alors que son engagement comme technicien comportait déjà une renonciation « en tant que de besoin » à tout droit de propriété artistique ».
Au terme d’une motivation très claire, la Cour d’Appel analyse pertinemment la nature de la mission d’un assistant réalisateur, ce dernier assumant un rôle purement technique, sans apport créatif au sens où l’entend le livre I du Code de la Propriété Intellectuelle.
Dorothée SIMIC