L’Autorité de la concurrence sanctionne le groupe Loste à hauteur de 900 000 euros pour avoir fait d’obstacle au déroulement d’OVS dans ses locaux

A l’occasion d’opérations de visite et saisie (« OVS ») menées par l’Autorité de la concurrence (ci-après l’« Autorité ») dans les locaux du groupe Loste et de la FICT dans le cadre d’une enquête dans le secteur de la charcuterie, des rapporteurs de l’Autorité ont constaté que des renseignements incomplets ou inexacts leur avaient été fournis par :

  • La directrice juridique d’une société du groupe Loste, désignée occupante des lieux, qui a donné des informations qu’elle savait erronées, en indiquant dans un premier temps à 10h45 que le dirigeant du groupe n’était pas présent sur place, avant de reconnaître, une trentaine de minutes plus tard, qu’elle l’avait préalablement rencontré pour lui faire part de la présence des agents de l’Autorité ;

  • Le dirigeant du groupe Loste (également vice-président de la FICT), qui a également donné des informations qu’il savait inexactes aux rapporteurs de l’Autorité en indiquant à 10h15 se trouver en déplacement à l’étranger, et après avoir quitté les lieux à 10h30 avec son téléphone portable et sa tablette, avant que son bureau soit placé sous scellé, avant de finalement revenir dans les locaux du groupe à 12h.

Pour rappel, l’article L. 464-2 Code de commerce permet à l’Autorité de la concurrence de sanctionner pécuniairement une entreprise, pour un montant ne pouvant excéder 1% du montant de son chiffre d’affaires mondial HT (ou celui des comptes consolidés le cas échéant), en cas d’obstruction à l’investigation ou l’instruction, notamment en fournissant des renseignements incomplets ou inexacts, ou en communiquant des pièces incomplètes ou dénaturées.

L’Autorité prend le soin de rappeler que « l’obstruction aux mesures d’investigations ou d’instructions s’entend par ailleurs de toute entrave au déroulement de ces mesures, imputable à l’entreprise, qu’elle soit intentionnelle ou résulte d’une négligence »[1].

L’infraction d’obstruction est considérée par l’Autorité comme particulièrement grave puisque ces faits sont de nature à entraver le bon déroulement des OVS et faire obstacle aux actes d’investigation ou d’instruction, avec un risque concret de déperdition ou d’altération des preuves.

Précisons que le groupe Loste a intenté des recours contre le déroulement de ces OVS, toujours pendants à la date de publication de la décision de sanction par l’Autorité. Selon le groupe Loste la procédure d’obstruction violerait son droit à un recours équitable en ce qu’elle le priverait de son droit à un recours effectif contre les OVS.

L’Autorité écarte néanmoins cet argument en indiquant que la procédure d’obstruction vise à assurer l’efficacité des enquêtes conduites par elle pour garantir le respect des règles de concurrence, et les recours formés contre les OVS constituent des procédures autonomes et indépendantes. En outre, les conséquences d’une éventuelle annulation des OVS pourraient être tirées le cas échéant par la cour d’appel de Paris statuant sur le recours qui serait formé contre la décision de sanction de l’Autorité.

En conséquence, l’Autorité considère ces faits comme étant constitutifs d’une infraction d’obstruction visée à l’article L. 464-2 du Code de commerce.

Après avoir énoncé que pour la détermination de l’amende, l’Autorité est fondée à prendre en compte la nécessité de garantir à celle-ci un effet suffisamment dissuasif et que les entreprises ne doivent pas pouvoir estimer qu’il serait avantageux pour elles de faire obstacle à une telle instruction, et de se prémunir de toute possibilité de sanction, l’Autorité prononce une sanction de 900 000 euros solidairement aux différentes sociétés du groupe Loste.

La sévérité de cette nouvelle décision de sanction fondée sur l’obstruction à l’instruction vient utilement rappeler l’importance d’être formé en entreprise aux bonnes pratiques en cas d’OVS dans la mesure où de simple déclarations – fussent-elles mensongères – peuvent justifier le prononcé d’une sanction, même en l’absence de toute démonstration de leur incidence concrète sur la procédure.


[1] Conseil constitutionnel, décision n° 2021-892 QPC du 26 mars 2021