Non-cumul des primes contractuelles et conventionnelles ayant le même objet ou la même cause
La Cour de cassation confirme, dans une décision publiée au bulletin du 11 mai 2022, qu’il n’est pas possible de cumuler une prime conventionnelle et une prime contractuelle ayant le même objet ou la même cause, en dépit de leur intitulé différent (Cass. soc., 11 mai 2022, 21-11240).
Dans cette affaire, deux primes s’opposaient :
- Une prime de production basée sur la présence du salarié à son poste de travail et jugée (par la cour d’appel) comme ayant été incorporée au contrat de travail des salariés.
- Une prime d’assiduité mise en place postérieurement par accord collectif.
Un salarié avait initialement saisi le conseil de prud’hommes en paiement d’un rappel de la prime de production. Ayant déjà procédé au paiement de la prime d’assiduité et considérant qu’une condamnation au paiement de la prime de production entrainerait un cumul d’avantages ayant le même objet ou la même cause (les deux primes étant, d’après lui, « destinée à récompenser le salarié de sa présence effective à son poste de travail »), l’employeur avait, quant à lui, sollicité, à titre subsidiaire en cas de condamnation à payer la prime de production, le remboursement de la prime d’assiduité. Après avoir condamné la société à payer la prime de production, la cour d’appel avait néanmoins débouté l’employeur de cette demande subsidiaire de remboursement considérant que si les deux primes rémunéraient effectivement la présence du salarié, la prime de production comportait de nombreuses conditions non reprises pour l’octroi de la prime d’assiduité dont le montant différait (voir le § 11 de la décision). Au contraire, d’après l’employeur, si la comparaison des modalités d’octroi et de calcul desdites primes pouvait servir à déterminer quelle était la prime la plus avantageuse et donc celle devant être appliquée en raison de l’identité de leur objet, cela n’avait pas d’incidence sur l’appréciation de leur objet ou de leur cause (voir les moyens annexés de la décision, relatifs au second moyen de cassation subsidiaire).
Dans son arrêt, après avoir rappelé le principe de faveur (art. L2254-1 c. trav. ; § 9 de la décision), la Cour de cassation réaffirme qu’« en cas de concours entre les stipulations contractuelles et les dispositions conventionnelles, les avantages ayant le même objet ou la même cause ne peuvent, sauf stipulations contraires, se cumuler, le plus favorable d’entre eux pouvant seul être accordé » (Cass. soc., 11 mai 2022, 21-11240, § 10).
Ensuite, d’après la haute juridiction, dès lors que les deux primes se fondaient sur la présence du salarié, les motifs avancés par la cour d’appel étaient insuffisants à caractériser que les primes de production et d’assiduité n’avaient pas le même objet (§ 12 de la décision). La décision de la cour d’appel est donc cassée et il appartiendra à la cour d’appel de renvoi d’apprécier si les deux primes ont le même objet ou la même cause et, dans l’affirmative, de condamner le salarié à rembourser à son employeur la prime d’assiduité.
En conséquence, si deux primes – bien que l’une contractuelle et l’autre conventionnelle – sont en concours et qu’elles ont soit le même objet, soit la même cause, il convient d’appliquer le principe de faveur. L’employeur est alors légitime à ne verser aux salariés que la prime la plus favorable.