Cet arrêt constitue la suite d’un litige opposant les deux opérateurs de téléphonie, Free et SFR.
Dans le cadre d’une offre commerciale, SFR proposait aux consommateurs d’acheter un téléphone mobile à un « prix attractif » et de souscrire parallèlement un abonnement mensuel « un peu plus cher » que l’abonnement classique pour une durée de 12 ou 24 mois.
Selon Free, qui en contestait la légalité, l’offre de SFR dissimulait en réalité (i) un crédit à la consommation et méconnaissait les dispositions du Code de la consommation en ne donnant pas les informations précontractuelles et contractuelles requises en la matière, ce qui constituait (ii) une pratique commerciale trompeuse.
Déboutée en première instance[1] et en appel, la société Free a finalement obtenu gain de cause devant la Cour de cassation[2].
Comme on pouvait s’y attendre, l’arrêt de la Cour d’appel de renvoi en date du 24 avril 2019 s’aligne sur la position de la Cour de cassation en qualifiant l’offre proposée par SFR de crédit à la consommation déguisé. En effet, la Cour de renvoi relève que la majoration mensuelle du forfait et la réduction substantielle du prix du téléphone proposé à un prix « attractif » sont mises en œuvre de manière concomitantes, ce qui permet de faire présumer qu’une partie des mensualités servait en réalité à rembourser l’avance consentie par SFR à ses abonnés sous forme de prix réduit du téléphone. De ce fait, le coût du téléphone payé par le consommateur se compose concrètement de l’addition du prix initialement payé au début de l’abonnement et de la différence entre les mensualités de l’abonnement classique avec l’abonnement au prix surélevé.
Au-delà, la Cour d’appel de renvoi relève que la publicité de cette offre ne fournit pas une information claire au consommateur sur la nature onéreuse du crédit et sur le coût global de son abonnement avec achat du téléphone au « prix attractif » dès la réalisation de la vente. Ainsi, SFR trompe sciemment le consommateur en lui faisant croire que cette option serait plus intéressante ce qui n’est pas toujours le cas.
En conséquence, la Cour de renvoi juge que SFR s’est rendue coupable d’avoir organisé une opération de crédit à la consommation en méconnaissance du respect des dispositions régissant l’information des consommateurs et considère que ces pratiques sont constitutives de concurrence déloyale et de pratiques déloyales et trompeuses.
Suite à cet arrêt, les concurrents ayant développé des pratiques similaires à celle de SFR devront s’assurer qu’elles respectent les dispositions relatives aux crédits à la consommation précisées aux articles L. 311-1 et suivants du Code de la consommation.
Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – chambre 4, 24 avril 2019, n° 18/18100
Christophe PECNARD et Inès FOUACHE
[1] « Et si Free avait tout compris ? » Christophe Pecnard et Agathe Duperray https://www.lextenso.fr/petites-affiches/PA201304901
[2] « Finalement Free avait bien tout compris ! » Christophe Pecnard et Agathe Duperray, https://www.lexology.com/library/detail.aspx?g=f94df680-06a9-40c3-8ca7-af35dc82698e