Jusqu’à présent, la jurisprudence était assez favorable au salarié s’agissant des litiges entourant le solde de tout compte. Par cette décision, la Cour de cassation marque un retour à une lecture littérale du texte de la loi applicable en la matière.
C’est ainsi qu’avant 2002, la loi prévoyait que le reçu pouvait être dénoncé par le salarié dans un délai de deux mois, à la condition expresse que ce document fasse mention, « en caractères très apparents », du délai de forclusion.
Puis, la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 retirait au reçu pour solde de tout compte la valeur libératoire qui lui était jusqu’alors assignée.
Puis enfin, la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 de modernisation du marché du travail réhabilitait l’effet libératoire du reçu pour solde de tout compte, sans pour autant préciser si mention expresse du délai de forclusion devait être apposée sur le reçu pour être opposable au salarié.
C’est ainsi que depuis 2008, l’article L.1234-20 du Code du travail dispose :
« Le solde de tout compte, établi par l’employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l’inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail.
Le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l’employeur pour les sommes qui y sont mentionnées. »
Cette rédaction devait permettre d’éviter toute interprétation extensive du salarié (et donc un éventuel litige) quant au contenu du solde de tout compte et dès lors sécuriser la rupture du contrat de travail.
Toutefois, qu’en est-il exactement des modalités pratiques et des conditions juridiques entourant l’effet libératoire du reçu ? C’est ainsi que :
– Le reçu de solde de tout compte doit expressément répertorier les sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail. En effet, le reçu n’a d’effet libératoire que pour les sommes qui y sont précisément inventoriées (Cass. Soc. 18 décembre 2013, n° 12-24.985). Ainsi, un salarié pourra élever un litige sur des sommes n’y figurant pas dans la limite du délai de prescription applicable à sa demande.
– Afin d’avoir un caractère libératoire, le reçu doit être signé par le salarié.
– La mention de la date de remise (même si elle n’est pas exigée par la loi) semble dès lors être indispensable afin de faire partir le délai de 6 mois ;
– Enfin, pour être recevable, la dénonciation doit être faite par lettre recommandée (article D.1234-8 du Code du travail)
Restait donc encore en suspens la question de l’information du salarié de l’existence du délai de dénonciation. C’est précisément ce point que vient de trancher la Cour de cassation en jugeant que :
« les dispositions de l’article L. 1234-20 du Code du travail en sa rédaction résultant de la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008, ne prévoient pas l’obligation pour l’employeur de mentionner sur le reçu pour solde de tout compte le délai de six mois pour le dénoncer ».
Le reçu a donc un effet libératoire, avec ou sans la mention du délai de six mois.
L’employeur n’a aucune obligation – légale et aujourd’hui jurisprudentielle – d’informer le salarié sur les effets du reçu qu’il lui remet lors de la rupture.
Tel est l’apport de cet arrêt.
Bettina SCHMIDT
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