La Cour d’appel d’Aix en Provence a eu à connaitre du différend opposant un annonceur (une mutuelle) à une agence de communication, concernant l’utilisation par l’annonceur du logo créé par l’agence après la rupture du contrat de collaboration qui les liait (le « caractère brutal » de la rupture du contrat, à l’initiative de l’annonceur, avait été retenu par la Cour d’appel de Paris).
Après avoir reconnu qu’en l’espèce le « logo-type est le produit de l’apport intellectuel de l’agence de communication qui l’a réalisé et donc susceptible d’une protection au titre du droit d’auteur », la Cour d’appel a estimé qu’il ne s’agissait pas « d’une œuvre dite collective au sens de l’article L.113.2 du code de la propriété intellectuelle, dès lors que [l’agence de communication] a créé, seule, le logotype à la demande de [l’annonceur] ; que l’activité créatrice est le seul apanage de [l’agence de communication] ; qu’aucun co-auteur n’a apporté sa contribution à l’élaboration de cette œuvre graphique ; que [l’annonceur] (…) n’a pas concouru de près ou de loin à l’élaboration de l’œuvre ; que la qualité de créateur de [l’agence de communication] découle de la commande qui lui a été passée par [l’annonceur] à cette fin expresse ».
Dès lors l’annonceur a été jugé «mal fondé à revendiquer l’application des articles L113-1 et L113-2 du code de la propriété intellectuelle qui l’a désigneraient en qualité d’auteur de l’œuvre collective, parce que divulgué sous son nom ».
En outre, après avoir rappelé les règles présidant à la cession de droit d’auteur, conformément aux principes édictés par l’article L.131-3 du code de la propriété intellectuelle, et énoncé « que la cession des droits patrimoniaux par un auteur ne peut résulter que d’une convention, l’entreprise souhaitant exploiter une œuvre de l’esprit qu’elle a commandée, doit obtenir les droits d’exploitation », la Cour d’appel a considéré qu’en l’espèce « la cession ne peut être déduite du fait que la commande concernait la création d’un logo-type, comportant les éléments d’identification de la [mutuelle], ce qui lui permettrait d’en disposer librement, sans limitation de temps, puisqu’étant la seule intéressée par l’exploitation du logo-type ».
Enfin, sur la base des stipulations du contrat de collaboration – qui prévoyait en l’espèce que « l’agence (…) autorise l’annonceur (…), pendant la durée du contrat a exploiter l’ensemble de ses créations » et que « ce droit d’exploitation est limité à la durée du contrat conclu entre l’agence et l’annonceur et aux utilisations prévues contractuellement » – la Cour d’appel a considéré que la mutuelle ne pouvait prétendre avoir « acquis les droits patrimoniaux sur l’œuvre créée ; qu’elle en avait seulement l’usage limité à la durée du contrat ».
Il a ainsi été jugé que l’annonceur avait commis des actes de contrefaçon de droit d’auteur en poursuivant l’utilisation du logo-type postérieurement à la résiliation anticipée du contrat de collaboration et la Cour d’appel a fixé le montant de l’indemnisation de l’agence de communication à hauteur de 55.000 euros, en considération « de la persistance de l’utilisation protéiforme du logo-type » et « des droits ou redevance éludés ».
Si la solution de cet arrêt peut se comprendre au regard des stipulations manifestement claires et non équivoques du contrat de collaboration, la motivation fondée sur les dispositions de l’article L.131-3 du code de la propriété intellectuelle présente en revanche une certaine ambiguïté et n’est pas exempte de toute critique.
Il convient en effet de rappeler que la Cour de cassation considère que les dispositions de cet article régissent les seuls contrats consentis par l’auteur dans l’exercice de son droit d’exploitation, et non ceux que peuvent conclure les cessionnaires avec des sous-exploitants et en a ainsi écarté l’application dans les rapports entre une agence de publicité (société commerciale cessionnaire du droit patrimonial de l’auteur) et un annonceur (Cour de cassation, 1ère chambre civile, 13 octobre 1993).
Dorothée SIMIC