Un nouveau revirement sur les conditions de recevabilité de l’action en contrefaçon d’une œuvre de collaboration ?
La jurisprudence relative à la recevabilité de l’action en contrefaçon d’une œuvre de collaboration ne finit pas d’évoluer.
5 juillet 2006).
Cette solution était applicable lorsque le fondement invoqué était la violation du droit patrimonial. En revanche, il était régulièrement jugé que l’action fondée sur la violation du seul droit moral ne nécessitait pas la mise en cause des co-auteurs de l’œuvre de collaboration.
Au visa de l’article L.113-3 du Code de la propriété intellectuelle (CPI), la 1ère Chambre Civile dans un arrêt du 11 décembre 2013, a renversé sa jurisprudence en jugeant que la recevabilité de l’action de l’auteur d’une œuvre première dirigée contre le seul exploitant d’une œuvre de collaboration arguée de contrefaçon n’est pas subordonnée à la mise en cause de l’ensemble des coauteurs de celle-ci (Cf. Netcom, février 2014).
Dans son arrêt du 30 septembre 2015, rendu également au visa de l’article L113-3 du CPI, la Cour de cassation vient modifier radicalement sa jurisprudence antérieure en cassant un arrêt de la cour d’appel de Paris qui avait rejeté la fin de non recevoir fondée sur l’absence de mise en cause du coauteur d’une œuvre de collaboration arguée de contrefaçon au motif que l’irrecevabilité ne peut être soulevée lorsque la demande est fondée sur la seule violation du moral de l’auteur.
Dans un attendu de principe, la Cour affirme que « la recevabilité de l’action en contrefaçon dirigée à l’encontre d’une œuvre de collaboration, laquelle est la propriété commune des coauteurs, est subordonnée à la mise en cause de l’ensemble de ceux-ci, dès lors que leur contribution ne peut être séparée, quelle que soit la nature des droits d’auteur invoqués par le demandeur à l’action ».
L’on peut se demander si les conditions de la recevabilité de l’action en contrefaçon devraient être examinées différemment selon que l’action en contrefaçon contre une œuvre de collaboration est exercée à l’encontre d’un seul exploitant qui ne pourrait alors pas invoquer en défense l’absence de mise en cause d’un ou des coauteurs de l’œuvre arguée de contrefaçon qu’il exploite, ou s’il s’agit d’une action engagée contre l’un des co-auteurs de l’œuvre de collaboration, parmi le cas échéant d’autres défendeurs, rendant ainsi l’action irrecevable tant sur le fondement du droit moral que du droit patrimonial.
Dans sa motivation, la Cour ne distingue pas ; la mise en cause de l’ensemble des co-auteurs semble donc être la condition de la recevabilité de toutes actions en contrefaçon à l’encontre d’une œuvre de collaboration, et ce quelle que soit la nature des droits invoqués par le demandeur.
Florence DAUVERGNE